Hannah Arendt pose ici la
question de la limite de la Raison d’Etat. Certaines actions moralement
injustes et indéfendables peuvent, en effet, s’avérer nécessaire en vertu d’un
droit supérieur de l’Etat. Récemment le « patriot act » (26 octobre
2001) nous a donné une excellente illustration de la raison d’Etat en
augmentant considérablement le pouvoir des agences de renseignement (FBI et CIA) sur le territoire américain et
en légalisant à l’avance toute procédure de « mise sur écoute » à
l’égard de citoyens suspectés de collusion avec le terrorisme. La création de
prisons réservées aux terroristes dans lesquelles l’utilisation de la torture
est autorisée (Guantanamo) fait également partie des mesures d’urgence du
« Patriot Act ». Ce terme désigne donc la possibilité pour un Etat de
se réserver un régime d’exception à l’égard des lois aussi bien civiles que
morales auxquelles sont soumis tous les citoyens. Jusqu’où peut aller cette
acceptation d’une « nécessité faisant droit », c’est-à-dire ce
consentement à l’idée selon laquelle les intérêts d’une totalité politique
prévalent sur toute autre considération morale. Se conduire bien, c’est un
devoir de citoyen mais dés que l’on se hausse au niveau des Etats, nous nous
situons dans le cadre d’un autre régime de nécessité au sein duquel seule
importe la conservation de l’Etat, c’est-à-dire le maintien de la sécurité, de
l’ordre et des lois à l’intérieur du territoire.
S’il faut torturer un homme
pour lui faire avouer le lieu d’un attentat susceptible de provoquer des
centaines de morts, doit-on le faire ? Avant de répondre de façon
précipitée : « oui » à cette question en arguant de la
sécurité de l’état et des citoyens, il convient de bien saisir qu’à partir de
l’instant où l’on porte la main sur cet homme, l’Etat dont on veut sauver
l’existence sera dés lors une juridiction à l’intérieur de laquelle la torture
sera finalement légalisée. Ce que nous faisons au nom de l’état ne peut se
concevoir autrement que s’accomplissant en lui. Justifier l’usage de la torture
pour la sauvegarde de l’état c’est intégrer à cet état la possibilité légale de
torturer. Sous cette perspective, quelque chose du terroriste criminel a gagné, en deçà de l’échec de l’attentat. On
pourrait presque dire que le terrorisme est devenu, par la torture du
terroriste, un « état d’urgence de l’Etat ».
Lors de la vague
d’attentats qui s’est déroulée à Paris en 1986, Charles Pasqua déclarait :
« nous allons terroriser les terroristes », sans réaliser peut-être
la nature philosophiquement problématique de ces propos car si l’Etat terrorise
les terroristes, alors cela signifie qu’il utilise des moyens de terroristes à
l’égard des terroristes et dés lors la question se pose de savoir en quoi il
demeure un Etat de Droit ?
On trouve l’une des
meilleures justifications de la Raison d’état chez Machiavel : « Il n'est pas
bien nécessaire qu'un prince possède toutes les bonnes qualités, mais il l'est
qu'il paraisse les avoir. J'ose même dire que, s'il les avait effectivement, et
s'il les montrait toujours dans sa conduite, elles pourraient lui nuire, au
lieu qu'il lui est toujours utile d'en avoir l'apparence. Il lui est toujours
bon, par exemple, de paraître clément, fidèle, humain, religieux, sincère
(...). On doit bien comprendre qu'un
prince, et surtout un prince nouveau, (...) est souvent obligé, pour maintenir
l'Etat, d'agir contre l'humanité, contre la charité, contre la religion même.
Il faut donc qu'il ait l'esprit assez flexible pour se tourner à toutes choses,
selon que le vent et les accidents de la fortune le commandent ; il faut que,
tant qu'il le peut, il ne s'écarte pas de la voie du bien, mais qu'au besoin il sache entrer dans celle du mal.(...)
Au
surplus, dans les actions des hommes et surtout des princes, qui ne peuvent
être scrutées devant un tribunal, ce que l'on considère c'est le résultat. Que
le prince songe donc uniquement à conserver sa vie et son Etat; s'il y réussit,
tous les moyens qu'il aura pris seront jugés honorables et loués par tout le
monde; le vulgaire est toujours séduit par l'apparence et par l'événement; et le vulgaire ne fait-il pas le monde
?"
Selon
lui, il est donc une sphère à l’intérieur de laquelle la morale n’a plus droit
de cité, c’est celle de l’état et de l’exercice du pouvoir. C’est comme si à
l’intérieur de ce domaine n’était bon que ce qui maintient l’Etat en
« état » et mal ce qui le menace. On mesure bien dans le style et les
expressions de l’auteur italien l’importance qu’il accorde à la morale : « dans
les actions des princes qui ne peuvent être scrutées devant un tribunal ».
Machiavel ne semble accorder aucun poids à la question du remords, de la
culpabilité, autrement dit à la notion de droit naturel. Rien n’est à
proprement parler bien ou mal, « dans l’absolu ». Mais il y a les
actions que les hommes « reconnaissent » comme bonnes et celles
qu’ils qualifient de méchantes ou vicieuses et c’est seulement au regard de
cette reconnaissance, de ce jugement effectif qui peut avoir des implications
directes sur l’exercice du pouvoir que le Prince doit accorder à la morale une
certaine importance. En fait c’est moins à la morale qu’à l’opinion et qu’à la
réputation de bonnes ou mauvaises mœurs d’une personne qu’un Prince se doit
d’accorder un peu d’importance à cette notion.
C’est donc avec Machiavel qu’est apparue le plus clairement dans l’évolution des théories
politiques l’idée selon laquelle rien ne pouvait se placer au-dessus des
intérêts de l’Etat et de celui qui en assure la charge. Ce qu’il faut que fasse
le chef de l’état (qui n’est pas nécessairement un président car tous les
états ne sont évidemment pas des
républiques) c’est toujours faire ce qu’impose « la situation »,
indépendamment de normes morales prétendument préexistantes. Mieux vaut une
injustice qu’un désordre. Après tout, c’est exactement l’un des arguments
avancés par certains antidreyfusards au moment de cette affaire qui divisa la
France. Il est plus « pratique » pour l’état-major français de faire
croire que Dreyfus est coupable, la question de savoir s’il l’est effectivement
étant tout à fait « de second plan ». L’Etat est une instance de régulation
de « la chose publique ». Son statut même suppose donc logiquement un
rapport au public dont l’opinion est un paramètre essentiel de l’équation d’un
« Etat fonctionnant bien ». Par conséquent, la nécessité que l’Etat
demeure et la décision qui, au cœur d’une situation, ne tend qu’à assurer cette
permanence, l’emporte sur la morale, la justice, la vérité. Il y a ce qui est,
et ce qu’il est bon que le public croit, étant entendu que quelque chose de
cette opinion du public entre en compte, en tant que paramètre crucial dans la
sauvegarde de la « machine étatique ».
Ce qui apparaît donc avec
Machiavel, c’est le dégagement radical de tout ce qui se justifie au nom de la
sauvegarde et de l’intérêt de l’Etat à l’égard de la morale. Mais alors que se
passe-t-il quand un état s’est doté de tout un arsenal légalisant le
crime ? Dans ce texte, Hannah Arendt comprend parfaitement la notion de
raison d’Etat. Elle ne la remet pas en cause d’ailleurs mais elle fait
remarquer qu’elle s’appuie sur un présupposé qui est son caractère d’exception
à l’égard d’une constitution « moralement » juste.
Le fait que l’Etat
puisse, dans une situation particulière, enfreindre les règles qui s’imposent à
tout citoyen repose sur cet impératif pour l’Etat d’assurer l’ordre, d’empêcher
la violence. C’est la nécessité pour le droit de fonder le droit qui
paradoxalement justifie qu’une action de l’Etat s’exclue du droit. L’exception
ici confirme et non seulement justifie la règle mais se justifie par la règle.
Le fait que l’état puisse ponctuellement agir « mal » ne se conçoit
qu’en référence à la nécessité pour l’Etat d’être l’Etat, étant entendu qu’il
est « bon » que « l’Etat soit ». Mais la notion d’ordre coïncide-t-elle nécessairement avec celle de
« justice » ? Le principe même de la « Raison
d’état » c’est qu’une injustice est préférable à un désordre. La règle est
donc la paix civile, l’exception est tout ce qu’un état se voit contraint de
commanditer occasionnellement afin d’éviter l’éventualité d’un
« trouble ». Mais que se passe-t-il quand l’Etat a choisi de déporter
et de supprimer toute une partie de la population de sa juridiction sous le
prétexte qu’elle est juive ?
La raison d’Etat n’a de
sens que lorsque l’on considère comme « acquis » que cet état n’est
pas fondé sur des principes criminels. Quelle peut être la nature de la
souveraineté d’un Etat qui n’agit conformément au bien que par raison d’Etat ?
On comprend ainsi le sens de ce texte qui est de mettre en question la nature
seulement « formelle » de la maxime de non-ingérence d’un Etat à
l’égard d’un autre Etat d’un point de vue international. Ce principe peut
s’appliquer dés lors que deux Etats ont ce point commun de n’agir
qu’exceptionnellement selon une modalité contraire au Droit. Il y a, selon
Hannah Arendt, quelque chose dans l’Etat nazi qui justifie qu’on ne lui
applique pas cette maxime car il n’est pas « pareil » que les autres états,
ou plutôt, et cette distinction est fondamentale : il n’est pas même,
précisément parce qu’il a perverti le principe même de raison d’Etat. Avec le
Troisième Reich, on ne peut pas littéralement passer du « pareil au
même » parce que, même s’il est administrativement un Etat, il applique
des lois dont le contenu est contraire à quelque chose d’élémentaire qui est
l’impossibilité pour un Etat de légaliser le crime, de justifier l’utilisation
courante et banalisée de la violence.
Ce qui constitue un
« Etat », c’est le principe de souveraineté. Or ce principe se
conçoit de deux façons : d’abord intérieurement, c’est-à-dire que les
citoyens de cet état sont soumis de fait à sa tutelle dans la mesure où la
personne morale de l’Etat est la garantie de l’application des lois à
l’intérieur du territoire, ensuite extérieurement, à savoir qu’aucun Etat
étranger n’a le droit de contester l’autorité exercée par cet Etat dans sa
juridiction. Finalement nous pouvons comprendre ces deux versants de la
souveraineté d’un Etat lorsque nous réalisons qu’ils reviennent en réalité à
une seule et même idée que l’on pourrait exprimer ainsi : « personne n’a le droit de contester
le droit », pas davantage à l’intérieur qu’à l’extérieur des
frontières de cet Etat. Si l’on met en question le droit d’un état d’incarner
le Droit, on se met en contradiction à l’égard de cette absolue nécessité selon
laquelle il faut bien, « à la fin des fins », qu’une autorité dotée
d’une force exécutive concrète rende effective l’application du Droit.
Comme
dit Pascal « la justice sans la
force est impuissante ; la force sans la justice est tyrannique. La justice sans force est contredite, parce qu'il y a toujours des
méchants. La force sans la justice est accusée. Il faut donc mettre ensemble la
justice et la force, et pour cela faire
que ce qui est juste soit fort ou que ce qui est fort soit juste. »
L’association
des termes « raison » et «état » dans l’expression manifeste
bien la nécessité de cette association entre force et justice. Il ne suffit pas
au Droit d’être juste pour être suivi et corrélativement ce n’est pas parce
qu’on est fort que l’on a raison. L’Etat est le rouage qui assure la liaison de
l’un et l’autre. Mais comment peut-on s’assurer de ceci que l’Etat est bien
institutionnellement la garantie du Droit ? Comment être sûr que l’Etat,
c’est-à-dire le fondement même du droit positif (l’application d’un droit légal
dans les limites d’un territoire), agisse conformément au Droit naturel
(intuition universelle et innée de ce qu’il est légitime de faire ou de ne pas
faire) ?
C’est
bien là l’une des questions sous-jacentes fondamentales posées par Hannah
Arendt. Lorsqu’un Etat exerce un droit positif qui va à l’encontre des
principes du Droit Naturel, est-il encore un Etat ? N’a-t-il pas violé le
principe le plus élémentaire de la légitimité de sa souveraineté ? Mais en
même se pose cruellement la question de savoir qui va en juger ? Qui le
peut, si ce n’est un autre Etat ? Mais, au nom de quel Droit tel Etat
pourrait s’arroger l’autorité de contester le droit d’un autre à exercer
« son » droit dans « son » Etat ? Nous atteignons ici
la limite imposée par la réalité géographique et politique de notre monde à
l’universalité de la notion du Droit. Si, la nature même du droit est d’être
conceptuellement définie selon une modalité universelle (on ne peut pas croire
que l’idéal de justice et d’équité s’arrête à des frontières physiques), son
application réelle se décline territorialement et laisse donc l’Etat seul en
charge de l’appréciation de ce qui est juste ou pas.
Il
est un concept de Droit particulièrement intéressant pour essayer de comprendre
cette ambiguité : c’est celui de « personne morale ». Ce terme
désigne « le groupement de personnes ou de biens ayant comme une personne
physique la personnalité juridique, mais n’étant pas une personne physique, la
personnalité morale s’acquiert après un certain nombre de formalités »
(Wikipédia). L’Etat est précisément la personne morale la plus importante du
droit public. Cela signifie qu’un mouvement embrasse la totalité des individus
d’une population, leurs biens, leurs actions, leur être et la place sous la
représentation et l’autorité d’une idée. Tous les français sont
« un » puisque ils sont les parties d’un Tout et que ce tout est une
personne morale. Il est donc absolument impossible de concevoir l’existence du
citoyen dans un état sans désintéressement, c’est-à-dire sans la prise en
considération par la partie qu’il doit se soumettre aux intérêts du Tout :
ce point est fondamental puisque il pointe vers ce fond « d’efficience
sacrificielle » commune à la politique (l’Etat) et à la morale (la vertu).
Avec Kant, on pourrait dire que la morale consiste dans un cosmopolitisme
strict (créer un monde humain fondé sur le désintéressement absolu d’une
volonté « bonne », en tant qu’universalisante »).
C’est
par rapport à cette efficience sacrificielle que la morale et la politique se
confondent et se combattent : qui aura le dernier mot : est-ce le principe de la Justice qu’il y
ait un Etat (droit naturel) ou un principe de l’Etat qu’il y ait une justice
(droit positif) ?
Le
problème posé ici par Hannah Arendt s’appuie sur celui-ci mais elle pose la
question sous un angle particulier qui est celui de la condition de souveraineté
d’un Etat. Faut-il qu’il y en ait une ? La raison d’Etat manifeste
l’exercice d’une certaine autorité qui, en cas de force majeure, peut être amenée à prendre des mesures d’extrême
urgence. « Force revient à la loi » entendons-nous dire souvent, mais
on peut, pour la raison d’Etat, inverser la maxime comme si la loi de l’état
revenait à la force et n’était précisément plus une loi puisque elle réside
alors dans une exception à la règle. Toute la question est alors de savoir si
cette mesure d’urgence qui revient à la force, retourne à la réalisation d’un
pouvoir fort et arbitraire comme à son vrai visage, à ce que l’Etat n’a
finalement jamais cessé d’être ou bien précisément à ce qu’il n’est pas. Le
recours à la force est-il l’exception du droit ou l’un de ces moments d’oubli
dans l’insouciance duquel il révèle finalement sa nature authentique ?
La
prise de position d’Hannah Arendt en faveur de la première option ne fait aucun
doute puisque elle insiste sur le fait que le 3e Reich inverse les
termes de la relation entre la morale et la réalité : autant un véritable
Etat n’use de violence que lorsque la réalité l’y contraint, autant le régime
nazi n’a fait preuve d’humanité qu’en dernier recours et sous le coup d’une
absolue nécessité. L’Etat ne peut déployer de prise d’initiative qu’au sein de
la dimension de la paix civile. Il n’est un Etat que dans la mesure où sa
liberté consiste à garantir la sécurité de ses citoyens et c’est quand il n’est
plus libre mais pressé par la situation qu’il peut être amené à faire des
exceptions à l’égard de cette règle. Nous sommes tous tentés d’affirmer que
« cela va sans dire » mais c’est précisément cette pseudo-évidence
que le nazisme a réfutée, et c’est précisément tout le propos d’Hannah Arendt
que de révéler cet implicite.
Dans
le principe : « aucun jugement possible d’Etat à Etat »
(négation du droit d’ingérence), il est un présupposé qui souterrainement
s’active, à savoir que la violence n’est pas la règle. Si, pour reprendre
l’expression de Max Weber, « l’Etat a le monopole de la violence
légitime », c’est aussi parce qu’en un sens il a l’exclusivité de la légitime « défense ». Il n’y a pas
de « légitime attaque ». Mais le troisième Reich, c’est justement le
régime de l’attaque légitime, la constitution de cette mythologie d’un peuple
jouissant « de par sa nature » d’un droit d’expansion territorial
légitime (c’est le Lebensraum, soit l’idée qu’un peuple est légitimé de par la
pureté de son « sang » et la supériorité de sa race à occuper l'espace d'un autre). En un sens, le 3e Reich illustre sous cet
aspect les dangers d’un Etat totalement débordé par des concepts hérités de la
Nation. Si le citoyen n’est plus protégé par l’état, c’est parce que cet état
fait droit à des distinctions de type ethnique. Mais alors ce n’est plus un
Etat.
Il
n’est, par conséquent, plus possible de lui faire crédit de cette
reconnaissance internationale du « par in parem ». Il ne suffit pas
qu’un Etat soit « un » pour qu’il soit un Etat, surtout quand cette
unité est revisitée, remaniée et, en un certain sens contestée, par l’esprit
ethnique d’une recomposition « raciale ». L’état allemand s’est
retourné contre ses propres citoyens juifs. La souveraineté de l’Etat ne peut
se réduire à la seule logique numérique de la personnification. Elle doit se
fonder en droit sur l’utilisation seulement exceptionnelle de la Raison d’Etat.
Nous réalisons ainsi quel est le propos authentique d’Hannah Arendt : elle ne conteste en aucune façon, l’efficience d’une raison d’Etat. C’est même le contraire : le 3e Reich n’a pas abusé de ces mesures d’urgence, il en a perverti l’esprit, l’efficience aussi bien que les termes (la violence comme règle et l’humanité comme exception). Mais, par contraste, cela nous permet de saisir le fondement de la souveraineté qualitative de l’Etat qui est la paix civile et la garantie de la sécurité de tous les citoyens. Autant le droit d’ingérence est légitime quand l’Etat ne s’appuie plus sur ce fondement, autant il n’a pas à être invoqué lorsque il le respecte. « Par in parem » est donc une maxime qu’il faut soumettre à conditions, qui ne prévaut pas aveuglément dans tous les cas de figure et pour tous les états.
Nous réalisons ainsi quel est le propos authentique d’Hannah Arendt : elle ne conteste en aucune façon, l’efficience d’une raison d’Etat. C’est même le contraire : le 3e Reich n’a pas abusé de ces mesures d’urgence, il en a perverti l’esprit, l’efficience aussi bien que les termes (la violence comme règle et l’humanité comme exception). Mais, par contraste, cela nous permet de saisir le fondement de la souveraineté qualitative de l’Etat qui est la paix civile et la garantie de la sécurité de tous les citoyens. Autant le droit d’ingérence est légitime quand l’Etat ne s’appuie plus sur ce fondement, autant il n’a pas à être invoqué lorsque il le respecte. « Par in parem » est donc une maxime qu’il faut soumettre à conditions, qui ne prévaut pas aveuglément dans tous les cas de figure et pour tous les états.
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