Toute la difficulté de ce sujet réside dans
cette expression : « machine à vivre ». Elle est donc la clé de
notre plan. Nous pouvons rédiger autant de parties que de significations
différentes de cette formulation, en partant de la plus simple et en allant
vers la plus complexe, la plus subtile.
« Machine à vivre » peut (au moins)
signifier :
a)
Mécanique physique, corps. La question devient
alors : « peut-on dire de l’homme qu’il n’est que son corps, que
cet assemblage d’organes régi par des lois mécaniques, comme on le dirait des
rouages d’une machine. Cela voudrait dire qu’à la source de nos comportements,
de nos actes, de nos pensées, de nos sentiments, etc. nous trouvons toujours
des sensations, des accidents du corps. Evidemment les philosophes matérialistes,
empiristes, comme La Mettrie s’imposent à notre esprit pour défendre cette
thèse alors que Descartes et Alain la contestent.
Le groupe 1 développera les arguments soutenant que tout
en l’homme s’explique par le corps alors que le groupe 2 défendra la
thèse opposée
b)
Des automatismes ou des processus inconscients
qui agissent à notre insu. Nous disons : « je fais ceci ou
cela » mais ce qui nous fait réellement agir penser et être est plutôt un
« ça ». Quand vous dites un mot à la place d’un autre et commettez un
« lapsus », « ça » parle en vous. Quand vous rêvez,
« ça » rêve en vous. Nous pouvons évoquer ici l’inconscient chez
Freud et l’habitude. Contre cette thèse, nous pouvons penser, de nouveau, à
Descartes et au texte extrait des « Méditations métaphysiques »
(« Je pense donc je suis »). Pour la soutenir, il est possible de
travailler les thèses de Freud sur l’inconscient (cf texte) et de Hume sur
l’habitude (cf texte).
Le groupe 3 défendra la thèse selon laquelle l’homme n’est
pas régi par un « ça » inconscient alors que le groupe 4
soutiendra la thèse opposée
c)
Un mécanisme absurde qui s’active aveuglément sans détenir en soi les raisons et les
objectifs de son fonctionnement. L’homme serait une machine à vivre parce qu’il
ne pourrait fonder aucune certitude objective quant au sens de son existence.
Le propre de l’homme serait alors de vivre « malgré tout », sans but,
ni visibilité, ni sens, un peu comme une machine qui ne ferait que tourner
absurdement sur elle-même. Vivante, elle ne fait que vivre encore, obstinément.
Il est possible de s’appuyer ici sur le désir, lequel nous fait osciller
constamment du besoin à la satisfaction puis de nouveau au besoin (texte de
Schopenhauer). Contre cette perspective, il s’agirait de défendre l’idée selon
laquelle l’être humain a une mission, l’histoire de l’homme aurait un sens (cf.
texte de Bossuet).
Le groupe 5 argumentera la thèse selon laquelle l’homme
est une machine à vivre sans idéal ni but alors que le groupe 6 défendra
l’idée contraire (l’homme accomplit quelque chose dans l’Histoire)
d)
Une machine au sens « producteur » du
terme. L’homme serait alors une
sorte d’opérateur qui ne cesserait de créer des configurations, des
combinaisons nouvelles à partir des éléments donnés qui s’imposent à sa vie.
Cette partie nous impose de faire des distinctions subtiles d’une part entre
Organisme, Machine et Mécanisme, d’autre part entre Vivre et Exister. Un
mécanisme est un système de liaison entre termes dépendants (Deleuze), un
organisme est un ensemble d’organes soumis à un ordre, à un rythme, ainsi qu’à des lois vitales. « La
machine est un ensemble de voisinages entre éléments distincts »,
indépendants les uns des autres. L’idée de Gilles Deleuze consiste à affirmer
que notre inconscient est une machine, ou une usine de montage qui ne cesse de
produire des « machines », des liens. On comprendrait beaucoup plus
de choses de l’anorexique, par exemple, si l’on cessait de dramatiser sa
maladie en lui supposant des complexes familiaux auxquels elle ne ferait que
réagir et en envisageant la possibilité qu’elle explore les possibilités de son
corps en cessant de le vivre comme un organisme et en le libérant comme une
machine de production (avec de nouveaux rythmes de nutrition faisant alterner
privation et boulimie).
Bien
sûr, l’anorexique prend le risque de la mort mais elle accomplit aussi, en le
faisant, quelque chose de ce qu’elle est inconsciemment : une machine à
exister (et il est inutile de se demander si c’est bien ou si c’est mal parce
que c’est comme ça). Exister, c’est signer son existence, créer incessamment de
nouvelles modalités de vie. Nous ne vivons pas, nous improvisons des machines à
créer aveuglément des façons d’exister nouvelles. Nous sommes des stylistes,
d’insatiables créateurs, mais ce régime constant de production qui sommeille en
nous nous effraie suffisamment pour que nous le dissimulions derrière une
routine de vie médiocre et appauvrissante. Qu’est-ce qu’un artiste ? Un
humain qui s’assume et libère en lui, de lui-même, ce flux de combinaison, ce
travail de bricolage par le biais duquel exister est une œuvre à improviser (cf
Texte de Deleuze)
Le groupe 7 travaillera exclusivement
cette thèse là.
Le groupe 8
sera composé du jury devant lequel
chaque groupe devra présenter son travail. Il lui reviendra donc de poser une
ou plusieurs questions à chacune des équipes qui dévoilera devant nous ses
arguments. Le groupe 8 devra
également prendre position sur chacune des prestations pour exprimer sa
préférence en la justifiant
lorsque deux thèses s’affrontent.
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