dimanche 7 juillet 2024

Terminale 2 / 3 / 6: préparation du second groupe d'épreuves en philosophie - Baccalauréat 2024

 



L’objectif de cet article est de rappeler (très brièvement: pour préparer efficacement l'épreuve il faut revoir les articles de ce blog qui développent, paragraphe par paragraphe, l'explication de l'oeuvre) les thèses essentielles et la structure du premier chapitre de « problèmes de philosophie » de Bertrand Russell, dans la perspective de l’oral du bac qui va bientôt avoir lieu pour les candidat.e.s du second groupe d’épreuves du baccalauréat. Rappelons la forme de cette épreuve. L‘examinateur.trice choisit un passage de l’oeuvre indiquée sur la liste (qu’il faut avoir sur soi). Les candidat.e.s disposent de 20 minutes de préparation pour un oral de 20 minutes. Il faut savoir que nombreux.ses sont les candidat.e.s dont la prise de parole ne durent pas plus de 10 minutes, voire 5 (15 minutes c’est déjà pas mal). Si c’est le cas pour vous, l’examinateur.trice posera des questions pour vous aider. Même si vous parvenez à parler durant 20 minutes (ce qui n’est pas une finalité en soi, il n’est pas question ici de faire du remplissage) il est possible que plusieurs interrogations soient posées à la fin de l’épreuve. L’essentiel est de ne jamais paniquer. La finalité de ces questions est d’aider les candidate.s à rattraper des points. Ce qu’il convient d’éviter à tout prix, c’est de donner l’impression de découvrir l’oeuvre (il faut savoir que cela arrive parfois).

Pendant les 20 minutes de préparation, il convient surtout de structurer un plan de façon à avoir quelque chose à dire durant 20 minutes, en principe, donc il n’y a pas suffisamment de temps pour rédiger quelque chose qu’il s’agirait de répéter simplement. Il faut, dans la mesure du possible, rédiger des éléments suffisant à vous rappeler de quoi il est question à la fois dans l’oeuvre et dans ce passage là en particulier.



1- Introduction

Dans l’introduction, on peut évoquer l’oeuvre dans son ensemble, la thèse qui la soutient. Ici on peut insister à juste raison sur le scepticisme de Bertrand Russell et le fait qu’il est mathématicien. Ce qui relie la philosophie et la science c’est ce que l’on pourrait appeler un scepticisme fondamental, méthodique. Ces deux disciplines se caractérisent par un mode de pensée qui n’est pas la foi, ni la croyance, ni l’opinion. Il ne peut perte question pour elles d’adhérer gratuitement sans examen ni justification à quelque thèse que ce soit. Le scepticisme est un courant de pensée qui remonte à l’antiquité avec Pyrrhon d’Elis (365 - 275 avant JC). Nous savons qu’il a suivi avec un autre philosophe Anaxarque la campagne en Asie d’Alexandre le Grand et qu’à cette occasion il a rencontré en Inde un autre courant de pensée dénommé la gymnosophie. C’est au contact de la philosophie hindoue qu’il a développé cette attitude qui consiste à suspendre son jugement et à poser qu’il est impossible de connaître avec certitude quoi que ce soit. Cette suspension c’est ce que l’on appelle l’epochè. 

Le scepticisme a connu de nombreux développements par la suite et séduit de nombreux penseurs occidentaux, comme Montaigne, Hume Nietzsche.  Avec Bertrand Russell ce scepticisme se mêle à l’influence du cercle de Vienne qui réussit plusieurs scientifiques et mathématiciens autour d’un positivisme logique qui soumet toute proposition à un esprit de démonstration logique très rigoureux. On peut dire du cycle de Vienne qu’il est à la fois rationaliste et empiriste. Parmi ses adhérents on compte Frege, Karl Popper, Bertrand Russell.


Dans son oeuvre le but poursuivi par Bertrand Russell est de prouver que le scepticisme loin de désenchanter la connaissance la stimule et finalement la sublime.  C’est finalement comme si la connaissance consistait à déployer davantage son impossibilité radicale qu’à soutenir dogmatiquement UNE affirmation.  Mieux vaut comprendre avec précision et rationalité ce qui nous échappe plutôt que de tomber dans l’illusion d’une certitude achevée. On peut ici songer à Karl Popper et à sa théorie de la falsifiabilité: ce à quoi on reconnaît une proposition scientifique c’est au fait qu’elle est testable réfutable et plus encore qu’elle ne sort jamais de cette condition de la réfutabilité. Une théorie scientifique n’est jamais prouvée, elle se situe toujours dans l’intervalle qui s’étend entre le toujours réfutable et le pas encore réfuté (cf cours sur la science: est-ce à la science qu’il faut demander la vérité sur l’être humain?)



2 - Plan de l'oeuvre

(attention: il n'est question ici que de rappeler la structure de l'oeuvre. Pour l'épreuve, en elle-même, il s'agit de proposer une explication linéaire du passage choisi, comme vous avez eu l'occasion d'en produire pour le sujet 3 de l'épreuve écrite mais évidemment avec des exigences moins élevées)


Il y a trois moments dans le premier chapitre:

  1. Du §1 au §11, Bertrand Russell  justifie la distinction entre l'apparence et la réalité des objets qui nous environnent. Il prend l’exemple de sa table de travail. Il prouve que les témoignages de nos sens ne nous autorisent pas à poser quoi que ce soit de certain de la table, notamment pour ce qu’il en est de sa couleur ( §3 et 5), de sa texture (§6), de sa forme (§7), de son toucher (§8).  Cela permet à l’auteur de faire plusieurs distinctions conceptuelles: le « témoignage sensoriel » décrit la sensation brute, la « sensation » désigne ces mêmes impressions brutes mais prises en compte par notre conscience, et enfin le terme d’« objet physique » s’applique à la réalité de l’objet « table ».  Toute la question donc se formule de la façon suivante comment pouvons nous déduire l’existence de l’ « objet physique » à partir des témoignages sensoriels à supposer que nous le puissions.
  2. Du § 12 au § 17,  Bertrand Russell va ensuite s’appuyer sur deux philosophes: Berkeley et Leibniz. Le point commun de ces deux auteurs est de réfuter l’existence de la matière. Cela n’implique  pas l’inexistence de la réalité mais celle ci est d’une autre naturelle que matérielle. Elle est spirituelle ou « idéelle ». Pour Berkeley les choses n’existent pas hors de la perception que nous avons. Tout ne réside que dans l’impression. Si une réalité ne se manifeste pas à nos sens, elle n’existe pas. Toutefois nos impressions ne suffisent pas à elles seules à fonder l’existence de cette chose encore faut-il qu’elle soit une idée conçue par Dieu. Berkeley est un évêque. Toute manifestation sensible d’une chose est donc le produit de l’entendement de Dieu ET de nos sens. La nature même de la réalité est donc idéelle. Rien n’est qu’en tant que nous le percevons étant entendu que c’est Dieu qui nous le donne à percevoir. Pour Leibniz, il faut d’abord comprendre la différence qu’il établit entre les vérités de raisonnement (2+2=4) et les vérités de fait (César a franchi le rubicond). Les premières sont absolument nécessaires: elles ne peuvent pas ne pas être alors que les secondes sont contingentes (elles auraient pu ne pas être). Toutefois, pour ces dernières, une fois qu’elles sont, elles sont absolument, totalement et sont irréfutables. Tout le travail de Leibniz est de prouver qu’il existe aussi un principe de raison suffisante qui oeuvre dans les évènements (c’est Dieu). Ce principe s’appuie finalement sur les monades, c’est-à-dire sur des petites âmes du monde qui sont intérieures sans communiquer les unes avec les autres mais dont chacune exprime l’unité et la totalité de l’univers existant. Or ces monades s’entrexpriment de telle sorte que chacune est absolument nécessaire à l’existence de ce Tout qu’est l’univers. Ces âmes sont évidemment spirituelles de telle sorte que nous ne cessons de faire l’expérience à chaque instant de l’esprit de cohésion par l’harmonie duquel le monde est monde, Dieu est Dieu, cette perception est cette perception.
  3. Du § 18 à 20, Bertrand Russell récapitule et répond aux deux questions initiales: cette table existe-t-elle? Oui, mais est-elle telle que nous la percevons? Non puisque qu’elle est  selon Leibniz, le produit d’une communauté de monades qui s’entrexpriment et selon Berkeley une idée réalisée par Dieu. Par conséquent il y a bien une différence entre l’apparence et la réalité. A partir de là, notre intérêt pour la philosophie et la science est décuplé. Grâce à ces deux disciplines, nous ne pouvons qu’être animé.e.s de la plus vive curiosité à l’égard de ce qui nous entoure puisque tout, absolument tout, devient énigmatique. Rien n’est tel qu’il le paraît et nos expériences les plus quotidiennes, les plus insignifiantes en apparence sont porteuses d’un secret, d’une nature mystérieuse qui ne se manifeste pas à nous immédiatement. 


3 - Conclusion

En conclusion, il est possible de rappeler que Russell est empiriste et que sa démarche est finalement l’opposé radical de celle de Descartes qui dans ses méditations métaphysiques part également de la question de la certitude et finit par la trouver dans l’existence de la pensée. Je peux douter de tout et même aller jusqu’à penser que je ne suis rien mais même la pensée de n’être rien existe. Il faut bien que la pensée de n’être rien « soit » donc il faut que ma pensée « soit » et il faut que moi qui la pense « soit » également. Russell qui contrairement à Descartes n’est pas innéiste choisit de poser la même question mais en se tournant vers la question de l’existence physique des objets qui nous environnent. Or s’il ne fait pas de doute que ces choses sont et que le monde existe, il est aussi avéré qu’il n’est pas tel que je le perçois. Ainsi notre expérience immédiate de l’existence des choses est déjà par elle-même porteuse de la nécessité d’une curiosité justifiée à l’égard de tout ce que nous vivons et cela à chaque instant. Le scepticisme est donc bel et bien une pensée dont l’ effet le plus évident est de réenchanter notre présence au monde contre la morosité et la monotonie nées de l’habitude.




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