dimanche 6 octobre 2019

Lettre à Michel Onfray - Pourquoi écrit-il de si bons livres? (Tiens c'est vrai ça: pourquoi? Et pourquoi il arrêterait pas?)

(Pascal Bruckner, Raphaël Enthoven, Luc Ferry, Alain Finkielkraut, Michel Onfray n’ont pas grand chose de commun mis à part leur engagement médiatique dans la pratique philosophique et leur condamnation unanime de Greta Thunberg soit pour ce qu’elle est, soit pour son image, soit pour ce qu’elle est censée, selon eux, représenter. Dans l’émergence de cette détestation partagée, quelque chose, donc, se dit « d’eux », d’une dynamique identitaire et toute la question est de savoir de quelle corporation il est fait signe dans cette unanime détestation: est-ce celle des intellectuels ? Des enseignants de philosophie ? De cinquantenaires exaspérés de l’aura dont jouit une adolescente dont le seul titre de gloire est de s’être assise devant le parlement suédois?
    Stigmatiser la bêtise, c’est très exactement le piège de la bêtise même puisque l’on sombre alors dans le travers que l’on croit abusivement dénoncer. La violence des invectives de Pascal Bruckner et de Michel Onfray à l’encontre de la jeune suédoise constitue donc un piège rhétorique dans lequel il convient de ne pas tomber, quitte à se révéler étrangement mieux éduqué que ces écrivains aussi perspicaces que talentueux.)
       
Michel Onfray content
Pourquoi est-ce l’article de Michel Onfray qui, dans ce concert d’accusations, a retenu notre attention? Parce qu’il est saturé de ces clins d’oeil subtils, de cette plume voltairienne, légère et si française qui finalement contraste avec la lourdeur monomaniaque du « cyborg post-capitaliste ». Au-delà de toutes les tares dont souffre l’adolescente, la plus grave est qu’elle semble désespérément dénuée de la moindre parcelle d’humour. Peut-être le philosophe français lui aurait-il pardonné certaines de ses plombantes attitudes si, au moins, elle avait pu parler du climat avec le minimum de coquetterie qui sied aux personnes de son âge, si elle avait été capable de plaisanter de ces extinctions de masse de nombreuses espèces animales, de la fonte des glaciers et des premières migrations climatiques qui caractérisent notre avenir immédiat. Au lieu de cela Greta Thunberg s’entête dans son obsession, et dans son autisme diagnostiqué, fait comme si la fulgurance d’un mot d’esprit ne valait pas après tout toutes les espèces animales et végétales de la terre. Et Michel Onfray s’y connaît diablement en mots d’esprit, je le cite:
Michel Onfray pas content
« Elle ne sort jamais sans sa gourde rouge coresponsable, comme jadis le commandant Cousteau avec son bonnet ou aujourd’hui Christophe Barbier qui arbore son écharpe rouge, même en tant de canicule - pardon d’épisode caniculaire »
- Ha!Ha! Ha! Chapeau bas Michel! Difficile de rester de marbre devant la magnificence de ces traits d’humour qui criblent la stupide jouvencelle: cette assimilation des personnalités à des accessoires de la même couleur et la subtile pirouette de la fin: « pardon: d’épisode caniculaire ». Ha!Ha! Ha! Ha! Mon gros Michou, on doit pas s’ennuyer chez toi! J’espère que toute ta famille est assurée contre les décrochages de mâchoire. Si tu leur donnes la prime exclusivité de toutes les galéjades de tes articles, ils doivent avoir de quoi se marrer jusqu’à 2050. »
        Mais reprenons: l’idée de départ de ton article de situer Greta Thunberg par rapport à la mésaventure de notre malheureux ministre de l’écologie François de Rugby: BRILLANT! Tout simplement SIDERANT de justesse et de pertinence argumentative! Tu suggères qu’au moins Greta Thunberg pourrait être ministre de l’écologie puisque, végane, elle ne mange pas de homard et en plus: c’est du second degré (ici il faudrait un jingle comme Antoine Daniel avec « c’est normal en Russie! », ici, ça ferait: « C’est du second degré! »). Mais où t’arrêteras-tu, Michel, dans cette surenchère de l’intelligence? J’ai déjà du mal à suivre.
        Tu poursuis avec un « Manu, tu devrais y songer » qui, en terme de rébellion active par rapport à l’autorité, me laisse pantois d’admiration devant tant d’outrecuidance. Michou! T’es trop fort! Fais gaffe quand même à pas te faire embastiller! On voudrait pas te perdre!
       
Michel Onfray: chaise de jardin
Je te cite: « Elle (Greta) a le visage, l’âge, le sexe et le corps d’un cyborg du 3e millénaire: son enveloppe est neutre. Elle est hélas ce vers quoi l’Homme va » C’est beau, on dirait  du BHL sur la place des martyrs à Tripoli. Et puis ton constat tragique à la fin: ce vers quoi l’homme va… » On reconnaît bien là l’encre Nietzschéenne de ta lucidité érudite, ton regard d’acier cadré par tes belles lunettes rectangulaires et tes œillères de cheval de trait. Ah Michou! Si, au moins, tu labourais un champ…
        Tu ne t’arrêtes pas là, tu tiens ta proie et tu ne la lâcheras pas. « Michounet, tu oses tout, et c’est à ça qu’on te reconnaît » (tu vois on a les mêmes références cinématographiques): « les journalistes nous font savoir avec moult précaution, presque en s’excusant, qu’elle est autiste - il faut le dire, sans le dire, tout en le disant quand même. Dont acte. Je laisse cette information de côté. L’usage métaphorique de ce mot est interdit pas la bien-pensance, mais on découvre qu’il l’est aussi dans son sens premier. Donc on le dit, mais on n’a rien dit. »
- Attends Michounet, que je comprenne bien: tu dis que tu ne dis pas ce qu’il est de bon ton de ne pas dire en le disant, c’est bien ça?  Je n’ai pas de mot assez expressif pour donner idée de la stupéfaction que j’éprouve devant tant de génie! Alors, comme moi aussi j’ai fait des études, la figure à laquelle tu fais allusion s’appelle de la "prétérition », du latin praeteritio (action de passer sous silence) sauf que toi tu surenchéris! Chéri! Et tu fais de la « prétérition within the prétérition » (comme Calderon, dans « la vida es sueno », fait de la fiction within la fiction), c’est-à-dire que tu ne tomberas pas dans la grossièreté qui suggérerait que c’est de la bien-pensance de ne pas oser dire que Greta est une pauvre autiste qui délire mais, en disant que tu ne le fais pas, tu fais ce que tu dis que tu ne feras pas ce dont tu dis par ailleurs qu’il ne faut pas le faire, en le disant. Le silence des espaces infinis de ton intelligence abyssale m’effraie…Onfray! Maintenant je comprends pourquoi des gens aussi intelligents que Pascal..... Praud t’admirent.
       
Onfray qui fait coucou: coucou! (sacré Michel!)
Sans compter que sur le fond t’as tout bon, mon cochon! Tu te rends compte de toutes les bêtises que l’on a avalées de la part de ces imbéciles d’autistes: Albert Einstein, Marie Curie, Thomas Edison, Isaac Newton, Alfred Hitchcock, Stanley Kubrick! Heureusement que toi,  BHL, Pascal Bruckner, Eric Zemmour et Luc Ferry vous tenez aujourd’hui le haut du pavé médiatique. Un peu plus et je croyais à la relativité générale! Et puis quand je pense à tous les habitants de Tchernobyl qui sont trop aveuglés par la bien-pensance pour se rendre compte qu’ils ne sont pas irradiés. Pas de pire bien pensance que celle qui va jusqu’à contaminer les compteurs Geiger, tout ça à cause de cette autiste de Marie Curie! (je suis sûr que tu préférais la polonaise qui buvait ça au petit déjeuner…Sacré Michou!)

Marie C: autiste
        Tu continues, Michel, ton implacable démonstration contre la bien pensance de Greta Thunberg et de son «  troupeau d’adolescents »:
 Plume à la main, le soir dans son lit, elle lit avec passion les volumineux dossiers du GIEC dont elle débite les chiffres, donc la science, avec une voix de lame de fer - jadis, c’était Rimbaud ou Verlaine qu’on citait quand on n’avait pas 17 ans… »
       
Le flou de la Maison Blanche
Tu es grand, Michel, comme l’arc de Triomphe ou la Tour Eiffel, un petit matin brumeux. Oui, les jeunes de ton temps, c’était pas ceux de maintenant. Quelle gueule ça aurait: réciter du Baudelaire à Donald Trump pendant qu’il se javellise les mèches au Roundup! T’as raison: il en resterait bouche bée, le trumpounet! Il nous twitterait les fleurs du mal, on pourrait plus l’arrêter! J’imagine une soirée avec toi, Finkielkraut, Luc Ferry, Pascal Bruckner: que de belles rimes en perspective, des souvenirs du temps où les jeunes gens « savaient lire », la subtile intelligence de vos jugements mûris sur les dérives de cette jeunesse qui s’intéresse au climat au lieu de se jeter sur vos ouvrages miraculeux de cinquantenaires lettrés.
        Tu franchis un cap quand enfin tu oses évoquer le fond du problème de Greta: elle ne s’en rend pas compte la pauvrette mais elle est le suppôt du capitalisme vert au lieu de défendre en lettres rouges les thèses anti-libérales de Michel Onfray, seul vrai représentant de la vraie gauche dans le paysage politique français.... "Non pas là…A gauche..Pas cette gauche là, non pas celle-là non plus… A gauche quoi!" 
Michel Onfray qui réfléchit
Si Diogène, La Mettrie, Reich, Nietzsche et Thoreau avaient un enfant, cela aurait été toi Michel! Tu serais sorti de leur ventre rond avec tes lunettes, ton front haut rayonnant de bienveillance et tes audaces révolutionnaires digne d’un  chroniqueur à « Touche pas à mon poste ». Tu serais né en criant, Michel, comme la plupart des enfants, sauf que ton cri aurait été sans nul doute « Fucking Greta! » Pauvre Greta dont le livre « rejoignez-nous » ne coûte que 3€ alors que si l’on mettait bout à bout tous les reliquats de ta logorrhée philosophante (19€ en moyenne) on atteindrait une coquette somme en les commandant,  sous le manteau, à Amazon.com
- Comment t’expliques ça Michounet? Oui, je comprends: tes lecteurs, c’est la plèbe qui menace, c’est ce flux de professeurs et d’anciens instituteurs, portant très haut les valeurs de l’Education laïque et républicaine: MGEN/CAMIF/TELEREMA/FRANCE-CULTURE, cette foule qui gronde et qui a si brillamment fait plier le gouvernement de notre président actuel qu’il prépare tranquillement son second quinquennat. Merci pour ton combat Michel, il ne cesse de s’amplifier à chacune de tes interventions chez Laurent Ruquier. J’en tremble encore!
       
Michel Onfray chante "les feuilles mortes"
Heureusement qu’on ne te la fait pas à toi, heureusement que tu as su voir derrière cette petite fille seule qui s’assoit devant le parlement le complot de la haute finance, la main-mise des exploiteurs des masses prolétaires, l’ombre des lobbies du pétrole et des industries plastique. Cela dit, on a un peu de mal à se représenter ce que cela veut dire le « capitalisme vert »? De la plus-value sur l’oxygène? Une OPA sur l’herbe? De la spéculation sur la hausse des températures? Tu n’es pas tombé dans le piège de t’expliquer là-dessus dans ton article et c‘est à cela que l’on reconnaît un pamphlétaire de talent: l’attaque ad personam. Il ne manquerait plus qu’un intellectuel de ton calibre ait à s’expliquer vraiment pour critiquer une ado autiste qui n’a jamais lu Hans Jonas.
       
autiste qui ne va pas bien
Là aussi tu es très fort, Michel, quand tu attaques précisément la référence philosophique qui selon toi, agit dans le discours de Greta, laquelle n’a donc rien inventé: Hans Jonas et son heuristique de la peur. Je te cite:
« Il s’agit pour Hans Jonas d’en finir avec la raison des Lumières qui n’a rien produit, sinon des catastrophes. Il faut dramatiser, inquiéter, amplifier, faire peur, c’est-à-dire tout le contraire de penser, examiner, réfléchir, débattre. On ne pense plus, on récite; on n’examine plus, on assène; on ne réfléchit plus, on psalmodie; on ne débat plus, on insulte, on excommunie, on anathématise. On ventile. »
        Michel Audiard: 1 - Hans Jonas: 0. J’aime tes parties de foot, Michel, et la subtilité de ta dialectique argumentative. Ta capacité à exécuter dans un dualisme très enrichissant l’un des rares auteurs à avoir posé dés 79 la question de la responsabilité d’une génération par rapport à l’autre est plus que convaincante.
- Tu es né quand Michel?
- En 1959
- Tu auras donc 91 ans en 2050, ce qui fait de toi l’un des Anciens les plus légitimés à envisager la fin de la civilisation Thermo-industrielle. Je te vois déjà avec Pascal Praud au dernier étage de la tour Eiffel, animer « l’heure des pros » sponsorisé par une marque de couches pour seniors, 2 m au-dessus de la Seine, pour toutes les maisons de retraite qui ont su maintenir leur antenne au sec.
       
Galilée aussi a discuté avec l’inquisition de l’héliocentrisme. Alors pourquoi Greta refuserait-elle de dialoguer avec des cadors de la pensée libertaire comme toi, Michel? Ah la démocratie! L’art d’avoir raison avec des intellectuels aussi ouverts d’esprits qu’Eric Zemmour, qu’Elisabeth Lévy, Pascal Bruckner! Et tout ça pour voir triompher la vérité sur C-News.
Pascal Praud: - On peut discuter de tout. Rien n’est tabou! On a le droit d’être climato-sceptique, pas vrai, Elisabeth?
Elisabeth Lévy: Oui….Gloups! j’ai envie de dire….Blop! Blop! Laissez-moi parler…Blop Blop….C’est quand même incroyable … Gloups….cette bien pensance écologiste….qui nous empêche….. Bloup! Bloup!
Pascal Praud:  Bloup!
       
Michel avant qu'il soit Onfray
Cher Michel, je continuerai bien à parler de la transe philosophique dans laquelle ta rigueur démonstrative m’a plongé mais bon, j’ai d’autres trucs à faire. A toutes celles et tous ceux qui mettent en cause tes qualités et ton érudition philosophique, je citerai pour finir, cette hyper-méga subtile figure de prétérition que l'on trouve aussi dans ton superbe article: « Nous les enfants », dit-elle quand elle parle! Quelle civilisation a jamais pu se construire avec des enfants? » Tu sais très bien que l’on peut répondre: « toutes » mais tu fais mine de l’ignorer pour que l’on croit que tu ne sais pas ce que tu sais, sans le savoir, tout en le sachant. Pas vrai Michel? Michel? 
Michel Onfray - Bloup!


Question: cet article est traversé de part en part par une figure de rhétorique très connue. Laquelle? (Celle ou celui qui trouve gagne un bon de non achat l'autorisant à ne pas acquérir toutes les "œuvres" à venir de Michel Onfray. C'est-y pas génial? Bloup!)

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