lundi 7 mars 2022

HLP Terminale (Histoire humanité violence): pourquoi l'homme est-il un être historique?

           


                  Le dernier cours nous a permis de dissocier clairement la sémiotique de la sémantique et de situer la différence entre le milieu animal et le monde humain dans cette distinction, en ceci que le milieu animal est pure sémiotique alors que le monde humain manifeste aussi de la sémantique. Il y a une langue à l’oeuvre dans ce processus par lequel l’animal comme la tique par exemple va «  reconnaître » la lumière, l’odeur et la chaleur pour s’y trouver toujours déjà dans son milieu (celui grâce auquel elle va se nicher dans la veine d’un gros animal qui passe en dessous d’elle). C’est ce qui fait Jacob Von Uexküll utilise l’expression de « porteur de signification » pour évoquer ces affects grâce auquel la tique est toujours déjà prise dans son milieu sans percevoir ce qui est autour parce que finalement il n’y a pas « d’autour », d’environnement (puisque il y a un milieu). L’être humain au contraire cherche à comprendre et à se faire comprendre, parce qu’en lui la sémiotique est liée à la sémantique. Tout ce que l’animal interprète en termes de milieu, l’Humain le vit comme une « situation » et qui plus est comme « cette » situation, ce par quoi l’homme est susceptible de faire de l’histoire alors que l’animal non (puisque le milieu est toujours le même). Gardons nous de mépriser la tique cependant car cette pauvreté en monde, cette ignorance voire cette stupeur animale qui la saisit et l’empêche d’être consciente de cette sémiotique du milieu est en même temps ce par quoi cette sémiotique se concrétise, ce qui fait que cette réalité du milieu se produit comme nature naturante (on pourrait dire en ce sens qu’elle est un peu comme une sorte de Dieu spinoziste ignorant faisant partie intégrante d’un « fiat lux »,  d’une effectuation du milieu « que la lumière soit! Et la lumière fut » qu’elle contribue à performer sans savoir qu’elle le performe.

Au contraire, l’homme est parfaitement conscient de l’existence du monde. Il en perçoit beaucoup plus de signaux que l’animal mais par contre, il est totalement à l’écart de cette effectuation. Que le monde soit, c’est ce qu’il vit comme une étrangeté, comme une effectivité qui le repousse. C’est pourquoi le philosophe Heidegger distingue la stupeur animale et l’ennui humain. En termes de sémiotique et de sémantique, on pourrait dire que la stupeur définit l’acte d’être pris dans la sémiotique du milieu alors que l’ennui traduit l’acte de s’efforcer de comprendre sémantiquement le monde.


Nous comprendrons mieux cette distinction et tout ce qu’elle peut induire en terme de violence et d’histoire si nous l’appliquons presque terme à terme à cette observation de Jean- Henri Fabre sur l’abeille dite chalicodome des murailles:

« Quand elle arrive avec sa récolte, l'Abeille fait double opération d'emmagasinement. D'abord elle plonge, la tête première, dans la cellule pour y dégorger le contenu du jabot ; puis elle sort et rentre tout aussitôt à reculons pour s'y brosser l'abdomen et en faire tomber la charge pollinique. Au moment où l'insecte va s'introduire dans la cellule, le ventre premier, je l'écarte doucement avec une paille. Le second acte est ainsi empêché. L'Abeille recommence le tout, c'est-à-dire plonge encore, la tête première au fond de la cellule, bien qu'elle n'ait plus rien à dégorger, le jabot venant d'être vidé. Cela fait, c'est le tour d'introduire le ventre. A l'instant, je l'écarte de nouveau. Reprise de la manoeuvre de l'insecte, toujours la tête en premier lieu ; reprise aussi de mon coup de paille. Et cela se répète ainsi tant que le veut l'observateur. Ecarté au moment où il va introduire le ventre dans la cellule, l'Hyménoptère vient à l'orifice et persiste à descendre chez lui d'abord la tête la première. Tantôt la descente est complète, tantôt l'Abeille se borne à descendre à demi, tantôt encore il y a simple simulacre de descente, c'est-à-dire flexion de la tête dans l'embouchure ; mais complet ou non, cet acte qui n'a plus de raison d'être, le dégorgement du miel étant fini, précède invariablement l'entrée à reculons pour le dépôt du pollen. C'est ici presque mouvement de machine, dont un rouage ne marche que lorsque a commencé de tourner la roue qui le commande. »

La distinction entre la perception (et formation) du milieu et celle du monde est absolument fascinante et dessine quelque chose comme un seuil critique. L’abeille vient déposer le contenu de sa récolte de pollen mais cela se fait en deux fois:1) elle aborde la cellule en marcha avant pour dégorger d’abord le contenu de son jabot par l’ouverture antérieure puis 2) elle rentre en marche arrière pour déposer sa récolte par derrière. Fabre interdit à l’abeille cette seconde entrée et constate que l’abeille retourne à sa cellule en marche avant, alors même qu’elle n’palus rien dans son jabot à dégorger par cette extrémité. Il est clair ainsi que l’abeille ne rentre pas en marche avant puis en marche arrière « pour » déposer sa récolte mais que c’est bel et bien une sorte de praxis incroyable, incompréhensible pour un être humain et, de fait, Fabre ne la comprend pas: « C'est ici presque mouvement de machine, dont un rouage ne marche que lorsque a commencé de tourner la roue qui le commande »

Il ne perçoit pas la richesse insondable de la stupeur animale qui certes ne sait pas ce qu’elle fait, mais participe par là même à un « Faire » proprement inimaginable pour un humain, ni plus ni moins que ce par quoi une sémiotique naturelle se fait naturante. Si précisément et définitivement le terme n’était pas aussi radicalement impropre, nous pourrions ici pointer la sémiotique au fil de laquelle le monde est monde (mais ce n’est pas un monde)

« Et cela se répète aussi souvent que le veut l’observateur » dit un peu triomphalement, ou ironiquement Fabre sans avoir la moindre idée de ce qu’il est en train d’interrompre, à savoir quelque chose d’un rituel accompli par des vestales aveugles ou des officiants drogués (stupeur)  mais qui réussirait à invoquer le milieu, alors que lui, pour vouloir absolument vivre et exister sans bandeau, comme tout être humain, s’exclue de cette invocation. Toutefois ici encore, retenons nous de stigmatiser l’attitude humaine qui bien, au contraire, est tout ce qu’elle doit être, à savoir qu’il est intéressant qu’il y ait monde aux yeux de l’homme. En cela consiste sa spécificité, et peut-être l’histoire pourrait-elle être non violente, c’est-à-dire peut-être l’être humain pourrait-il sans rien perdre de son essence, de ce qui fait qu’il est Homme, à savoir la sémantique, l’envie de comprendre ce que l’animal inconsciemment reconnaît, la vivre, l’accomplir « authentiquement », dans une pleine et entière conscience.

   


                De quoi l’abeille se voit-elle finalement exclue, interdite par la paille par laquelle Fabre ferme la cellule pour la seconde entrée? Ce point est crucial: autant Fabre dirait « juste la seconde entrée », autant l’abeille dirait …. Toute l’effectuation sous l’action de laquelle le milieu est milieu, l’abeille est abeille, le pollen est pollen, ce qu’il faut appeler la totalité d’un « maintenant » animal, et d’un maintenant qui dure toujours, qui ne fait qu’advenir, par quoi l’abeille ne peut en aucune manière vivre ni effectuer son entrée comme une seconde entrée. Fabre n’a vraiment aucune conscience 1) de ce qu’il interrompt joyeusement: la cérémonie de « la venue au milieu du milieu » (sur le même monde que nous évoquons la venue au monde mais ce n’est pas un monde).Cela fait de sa seconde paille « une profanation » 2) du « hors milieu » dans lequel l’abeille erre. Seul le terme « immonde » qui désigne étymologiquement ce qui est suffisamment inclassable, horrible, terrifiant pour ne pas pouvoir faire monde, « cosmos » peut donner une petite idée de ce que Fabre perçoit comme un « simulacre d’entrée » alors qu’il ne s’agit ni plus ni moins que d’une mise à l’index du « Fiat lux » du milieu animal.

Représentons-nous une cérémonie d’invocation susceptible de faire apparaître le milieu , de le faire surgir par la une sémiotique magique, par les correspondances baudelairiennes  (qui nous parle à très bon escient de « temple ») et nous nous ferons une idée parfaite de ce à quoi correspond la double entrée de l’abeille dans la cellule: ni plus ni moins qu’une danse invocatrice d’un démon qui vient, sauf que ce « démon » est le milieu. Cette « danse » fait apparaître le milieu dans lequel l’abeille prend corps.  Elle fait corps avec ce que c’est qu’être corps pour le milieu. Tout ici s’effectue dans une instantanéité festive à peine réalisable pour un être humain. L’est-elle d’ailleurs? Quiconque est animé du désir de comprendre l’animal doit répondre positivement à cette question et c’est exactement ce que Gilles Deleuze entend par « avoir un rapport animal avec l’animal » mais Fabre en est très loin, comme l’écrasante majorité de la population humaine.

            


Mais ce qui doit attirer notre attention est cette notion même de seconde entrée de l’abeille telle que Fabre ne peut pas l’interpréter autrement parce que de fait quelque chose de proprement humain pointe dans cette impossibilité de saisir la fête instante du milieu animal, c’est l’ennui dont nous parle Heidegger. Dans un lieu au sein duquel les animaux sont toujours déjà impliqués dans l’effectuation de leur milieu, l’homme est « là » , il est un « être là » (Da-Sein). Il ne comprend pas bien ce qu’il fait là, ou plutôt il n’investit pas vraiment ce lieu là parce qu’il veut comprendre au lieu de reconnaître (mais il n’a rien à reconnaître: c’est là sa spécificité, ce qui constitue son « propre »)

Quelque chose de ce décrochage par quoi l’Humain est un être historique ou historial (comme dirait Heidegger) se produit dans cette perception humaine de la seconde entrée. L’être humain instaure une rupture entre deux situations là où l’animal ne vit (dans la stupeur, c’est-à-dire sans le savoir) que la structure continue d’un renvoi de signaux. En d’autres termes, Fabre interprète comme répétition ce qui est de l’ordre d’une continuité: celle de la première entrée en marche avant et de la seconde entrée en marche arrière. Tout ceci ne compose que l’effectivité d’un même maintenant pour l’animal, une continuité sans termes, un « tout en un ». Que nous apercevions ce « tout en un »  comme la répétition d’un acte: «  entrer » voire que nous l’interrompions, comme le fait Fabre (avec violence, dans un esprit d’expérimentation) manifeste notre être au monde qui s’effectue dans « un être au temps » qui induit une succession de situations: ceci puis ceci puis ceci ( c’est le « demain et demain et demain…. » de Macbeth), c’est l’histoire, le temps historial où se dit bel et bien notre nature profondément sémantique.

Dans cette expérience et ce qu’elle recèle de « profanation » s’illustre au plus haut point une distinction de temporalité plus encore que la distinction entre le milieu et le monde, tout ce qui empêche Fabre de réaliser que ce qu’il voit comme une répétition de l’abeille (la seconde entrée en marche avant est en réalité une danse d’invocation qui se déploie dans une continuité sans succession) est en fait la participation d’un milieu toujours en train de s’actualiser. Nous comprenons ainsi pourquoi l’être humain est historique et ce que cette histoire recèle de violence potentielle mais que cette violence potentielle ait nécessairement à se manifester n’est pas du tout une affaire entendue et la pacification de cette histoire humaine n’est aucunement hors de portée de l’humain, à condition peut-être de se retenir du geste de Fabre (la paille).



Fabre ne comprend donc pas la deuxième entrée en marche avant de l’abeille. Elle lui semble dépourvue de sens dans la mesure où le pollen a déjà été déversé par cette extrémité là du jabot. Il applique évidemment le schéma de l’utilité, de la poiesis, parce que c’est non seulement ce que lui, en tant qu’être humain, que travailleur, aurait fait, mais surtout parce qu’il n’imagine pas que la nature puisse être autre chose que nature naturée, que « des rouages » comme il le dit lui-même, que « machine », fonctionnement vide qui en réalité ne crée rien.

Grâce à Von Uexkull, nous saisissons au contraire que cette seconde marche avant s’inscrit dans une sémiotique efficiente, celle au gré de laquelle l’animal est sous l’emprise de la « venue au milieu du milieu », de l’installation du milieu. Ici évidemment nous serions tentés de dire « venue au monde », mais ce serait en tant qu’humains que nous le dirions. « Que le milieu soit et le milieu est » et dans ce milieu l’abeille est, et elle ne peut absolument être ni se comporter ailleurs ni autrement. Cela signifie que là où Fabre ne voit qu’une poiesis avortée et un « simulacre » de rentrée, lorsque l’abeille doit demeurer au seuil de la cellule, se produit en réalité une praxis (agir pour agir) et un « réel désoeuvrement », expression qu’il nous faut comprendre comme désoeuvrement de la possibilité de réaliser le réel, désoeuvrement tel qu’il n’est pas possible à nous humains de nous en faire une idée si ce n’est par le terme: « immonde » (privé de monde, laissé au seuil de cette réalisation du milieu, de cette emprise).

      


A ce moment un rapprochement très fructueux peut être tenté: c’est celui de ce passage de l’Odyssée au cours duquel nous voyons Pénélope défaire la nuit ce qu’elle a fait le jour pour retarder le moment de choisir celui de ses prétendants qui partagera avec elle le trôle d’Ithaque. Pourquoi? Parce que Pénélope, alors, tisse pour tisser et pas du tout pour tisser une toile , de la même façon que l’abeille entre pour entrer et pas du tout pour déposer du pollen. Quelque chose d’une étrange praxis se fait jour dans cette épopée, et cela à l’occasion d’une action qui habituellement vise un produit fini: la toile. Mesure-t-on suffisamment ce qui se joue dans cette praxis de Pénélope? Elle n’est ni plus ni moins en train de suspendre dans ce mouvement de tissage et de détissage la trame même de l’épopée car nous ne voyons pas très bien comment l’histoire aurait pu suivre son cours si son subterfuge avait fonctionné indéfiniment. A quoi bon le retour d’Ulysse finalement? Pénélope comprend quelque chose d’extrêmement puissant qui probablement correspond point par point à ce que Fabre, au contraire, ne comprend pas du tout, à savoir qu’il y a dans la praxis quelque chose qui se joue de la venue au milieu du milieu et du monde au monde.

Mais il faut saisir ici tout ce que « la vérité » ou ce que l’on peut appeler un sens de l’interprétation plus affûté recèle de risque, de danger, peut-être d’impossibilité en mesurant tout ce qu’aurait impliqué dans ces deux exemples de l’observation entomologique et de l’écriture de l’épopée d’une part un Jean-Henri Fabre qui aurait compris ce qu’il voit et de l’autre un Homère qui aurait crédité Pénélope de cette puissance de suspendre en fait l’épopée dans les fils de cette toile incessamment réitérée, sans cesse remise sur l’ouvrage de ce métier là. 

Von Uexkull et Pénélope nous font signe d’une matrice insoupçonnable et à bien des titres irreprésentable, inconcevable à des pensées humaines, juste humaines, celle d’un acte qui ne vise que lui-même et qui dans cette obscurité même dans cette opacité qui est celle de l’abeille et celle de Pénélope abîmée dans sa tâche, toute occupée à ne tisser que pour tisser se rend disponible à la réalisation même sous l’emprise de laquelle la nature se fait naturante. Quel compte-rendu d’expérience un Jean-Henri Fabre soudainement lucide pourrait-il bien écrire au sujet de ce qui enfin lui apparaîtrait « tel que » et quelle étrange épopée Homére pourrait-il rédiger ou raconter si elle devait consister exclusivement dans la description des motifs tissés par Pénélope le jour et détissés la nuit? Ce qui fait de ce passage de l’Odyssée un moment à tous égards improbable, inconcevable, d’une incongruité sidérante, terrible, et en même temps pour cette raison même, remarquable au sens littéral, c’est que par cet épisode de la toile détissée et retissée, c’est l’esprit même de l’épopée qui « fuit » comme l’eau d’un lavabo se vide par le siphon. La civilisation grecque des héros et conséquemment la notre est littéralement siphonnée dans ce petit épisode là, de telle sorte qu’il est à bien des égard le seul moment vrai d’une civilisation qui va s’édifier sur le mythe de la ressemblance avec des héros qui vont à la guerre chercher la gloire pour que l’on parle d’eux dans l’Histoire (c’est ce que Werner Jaeger appelle la païdeia, l’éducation des grecs à partir des héros de la mythologie). 



                        Il faut qu’Ulysse vienne sauver la « situation », parce que situation il y a, et donc que Pénélope soit trahie par une servante pour que l’arrivée de son mari soit providentielle et qu’enfin les prétendants soient tués dans un bain de sang grâce auquel le père et le fils se retrouveront, lance et arc en mains,  et se vengeront des offenses infligées à leur foyer par leurs ennemis. Peut-être n’est-il pas d’argumentation plus claire ni plus décisive à l’évidence d’une histoire violente que là, dans ce qui est ici mis à jour, à savoir la nature profondément « inénarrable » de ce que Pénélope parvient à imposer: le siphonnage de l’esprit épique de l’Humain dans la pure praxis d’une tâche par laquelle une femme côtoie l’efficience réalisatrice  de la nature naturante.
 

                Dans le film de Wim Wenders et de Peter Handke, un Homére moderne interroge Damiel, l’ange, et lui demande: "pourquoi n’existe-t-il pas d’épopée pacifique?" Peut-être avons nous un embryon de réponse à lui proposer:  parce qu’il n’est pas vraiment concevable que Fabre puisse à l’occasion d’une expérience saisir ce qui pointe vers une atemporalité fondamentale, vers une sémiotique pure, pas davantage qu’il n’est vraiment concevable qu’une civilisation puisse s’édifier à partir du récit d’une femme tissant et détissant une toile qui ne verra jamais le jour. La question posée par ce Homére revisité est très pertinente évidemment, voire d’une pertinence hallucinante, en ceci qu’elle ouvre un seuil. Von Uexkull nous fait comprendre ce que Fabre n’a pas su voir, à savoir que l’abeille est sous l’emprise d’une nature naturante par quoi s’effectue la réalisation d’un milieu mais est-ce que l’homme peut et doit se mettre sous l’emprise d’un milieu? Non, il n’en possède pas. L’homme est privé de milieu et riche en monde. Mais il peut contrairement à Fabre rester là: et voir en se tenant sur ce seuil l’insoupçonnable puissance de la praxis animale sous emprise, an-historique. 

 


De la même façon, Homère avec ce passage incroyable par lequel une épopée trace sa propre ligne de fuite, son déversoir, le siphon dans le mouvement de perte duquel elle s’annihilerait (et le conditionnel est d’importance) se tient pareillement à un seuil, mais de la même façon que nous pouvons nous sauver du nihilisme de Macbeth en le renvoyant brutalement sa situation d’acteur, il nous faut sauver l’épopée guerrière tout en en saisissant parfaitement tout ce qui s’y joue de fondamental pour notre condition Humaine. Rester dans la lucidité conditionnelle (au sens de conjuguée au conditionnel) de la toile de Pénélope c’est assumer notre condition d’êtres humains. Il n’est pas exclu que la guerre soit finalement le seul moyen de tromper notre ennui, de désoeuvré fondamental, par rapport à la praxis animale une fois qu’on l’a vraiment comprise. Par conséquent, cette épopée guerrière a du sens, elle fait sens tout comme fait sens la trahison de Pénélope par la servante. Le regard en arrière d’Orphée vers Eurydice fait sens également, mais dans une acception de pure sémantique qu'il nous faut tout aussi bien assumer que comprendre (cum-prendere). IL FAUT que la servante trahisse, comme IL FAUT qu'Orphée se retourne  comme IL FAUT que l'Humain soit dans le monde et non sous l'emprise d'un milieu fusse-t-il celui de la nature naturante. Tous ces IL FAUT conjoignent dans l'épopée guerrière d'abord, dans l'histoire violente ensuite, dans l'éthologie ouverte enfin (celle de Jacob Von Uexkull et non celle de Jean Henri Fabre).

Tout ceci prend sens contre Macbeth et sa pseudo sagesse de désespéré qui dans une histoire dit que l'Histoire (avec un grand H)  n'a aucun sens sans se rendre compte qu'en tant que personnage d'une pièce, il est bel et bien est train de lui en donner un, de donner à cette logique absurde d'une sémiotique absurde (les petits pas du jour en jour qui va jusqu'à la dernière syllabe du registre des temps) une sémantique, un visage, fût-ce lui d'une pièce tragique et d'ailleurs quel autre visage pourrait convenir?




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