lundi 3 octobre 2016

"Peut-on dire de l'homme qu'il est une machine à vivre ?" - Travail en groupes


Toute la difficulté de ce sujet réside dans cette expression : « machine à vivre ». Elle est donc la clé de notre plan. Nous pouvons rédiger autant de parties que de significations différentes de cette formulation, en partant de la plus simple et en allant vers la plus complexe, la plus subtile.

« Machine à vivre » peut (au moins) signifier :

a)     Mécanique physique, corps. La question devient alors : « peut-on dire de l’homme qu’il n’est que son corps, que cet assemblage d’organes régi par des lois mécaniques, comme on le dirait des rouages d’une machine. Cela voudrait dire qu’à la source de nos comportements, de nos actes, de nos pensées, de nos sentiments, etc. nous trouvons toujours des sensations, des accidents du corps. Evidemment les philosophes matérialistes, empiristes, comme La Mettrie s’imposent à notre esprit pour défendre cette thèse alors que Descartes et Alain la contestent.
Le groupe 1 développera les arguments soutenant que tout en l’homme s’explique par le corps alors que le groupe 2 défendra la thèse opposée
b)     Des automatismes ou des processus inconscients qui agissent à notre insu.  Nous disons : « je fais ceci ou cela » mais ce qui nous fait réellement agir penser et être est plutôt un « ça ». Quand vous dites un mot à la place d’un autre et commettez un « lapsus », « ça » parle en vous. Quand vous rêvez, « ça » rêve en vous. Nous pouvons évoquer ici l’inconscient chez Freud et l’habitude. Contre cette thèse, nous pouvons penser, de nouveau, à Descartes et au texte extrait des « Méditations métaphysiques » (« Je pense donc je suis »). Pour la soutenir, il est possible de travailler les thèses de Freud sur l’inconscient (cf texte) et de Hume sur l’habitude (cf texte).


Le groupe 3 défendra la thèse selon laquelle l’homme n’est pas régi par un « ça » inconscient alors que le groupe 4 soutiendra la thèse opposée
c)     Un mécanisme absurde qui s’active aveuglément sans détenir en soi les raisons et les objectifs de son fonctionnement. L’homme serait une machine à vivre parce qu’il ne pourrait fonder aucune certitude objective quant au sens de son existence. Le propre de l’homme serait alors de vivre « malgré tout », sans but, ni visibilité, ni sens, un peu comme une machine qui ne ferait que tourner absurdement sur elle-même. Vivante, elle ne fait que vivre encore, obstinément. Il est possible de s’appuyer ici sur le désir, lequel nous fait osciller constamment du besoin à la satisfaction puis de nouveau au besoin (texte de Schopenhauer). Contre cette perspective, il s’agirait de défendre l’idée selon laquelle l’être humain a une mission, l’histoire de l’homme aurait un sens (cf. texte de Bossuet).
Le groupe 5  argumentera la thèse selon laquelle l’homme est une machine à vivre sans idéal ni but alors que le groupe 6 défendra l’idée contraire (l’homme accomplit quelque chose dans l’Histoire)
d)     Une machine au sens « producteur » du terme. L’homme serait alors une sorte d’opérateur qui ne cesserait de créer des configurations, des combinaisons nouvelles à partir des éléments donnés qui s’imposent à sa vie. Cette partie nous impose de faire des distinctions subtiles d’une part entre Organisme, Machine et Mécanisme, d’autre part entre Vivre et Exister. Un mécanisme est un système de liaison entre termes dépendants (Deleuze), un organisme est un ensemble d’organes soumis à un ordre, à un rythme,  ainsi qu’à des lois vitales. « La machine est un ensemble de voisinages entre éléments distincts », indépendants les uns des autres. L’idée de Gilles Deleuze consiste à affirmer que notre inconscient est une machine, ou une usine de montage qui ne cesse de produire des « machines », des liens. On comprendrait beaucoup plus de choses de l’anorexique, par exemple, si l’on cessait de dramatiser sa maladie en lui supposant des complexes familiaux auxquels elle ne ferait que réagir et en envisageant la possibilité qu’elle explore les possibilités de son corps en cessant de le vivre comme un organisme et en le libérant comme une machine de production (avec de nouveaux rythmes de nutrition faisant alterner privation et boulimie).
Bien sûr, l’anorexique prend le risque de la mort mais elle accomplit aussi, en le faisant, quelque chose de ce qu’elle est inconsciemment : une machine à exister (et il est inutile de se demander si c’est bien ou si c’est mal parce que c’est comme ça). Exister, c’est signer son existence, créer incessamment de nouvelles modalités de vie. Nous ne vivons pas, nous improvisons des machines à créer aveuglément des façons d’exister nouvelles. Nous sommes des stylistes, d’insatiables créateurs, mais ce régime constant de production qui sommeille en nous nous effraie suffisamment pour que nous le dissimulions derrière une routine de vie médiocre et appauvrissante. Qu’est-ce qu’un artiste ? Un humain qui s’assume et libère en lui, de lui-même, ce flux de combinaison, ce travail de bricolage par le biais duquel exister est une œuvre à improviser (cf Texte de Deleuze)

Le groupe 7 travaillera exclusivement cette thèse là.

Le groupe 8 sera composé du jury devant lequel chaque groupe devra présenter son travail. Il lui reviendra donc de poser une ou plusieurs questions à chacune des équipes qui dévoilera devant nous ses arguments. Le groupe 8 devra également prendre position sur chacune des prestations pour exprimer sa préférence en la justifiant lorsque deux thèses s’affrontent.

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