lundi 6 février 2023

Terminale HLP: Violence et Histoire (3)

 


5) Part immonde de l’être historique - Histoire de l’être immonde 

Evidemment ce n’est pas un hasard si Spinoza prend l’exemple de la mort d’un homme pour illustrer cet asile de l’ignorance dans lequel les adeptes d’une finalité se réfugient. L’être humain est un animal symbolique, c’est-à-dire qu’il ne se conçoit pas autrement qu’en tant qu’ « enfant à la bobine » à condition de donner à ce terme qui fait référence à l’observation freudienne un sens plus large: celui de l’être humain trouvant dans le symbolisme et dans la langue un mode tout à fait spécifique de rapport au monde au sein duquel il s’affirme en tant que « je », c’est-à-dire en tant que libre arbitre. Une revendication à marquer une rupture avec «  la propension des choses », avec « la vie comme elle va »  (et l’absence de la mère) se manifeste dans le mimétisme du jeu et la possibilité qu’il ouvre fictivement d’être l’acteur de ce dont il était la victime (disparition/apparition). Au sein d’une réalité dans laquelle les évènements s’effectuent sans lui, sur lui mais certainement pas par lui, voilà que le symbolisme ouvre la possibilité d’une représentation d’une maîtrise. Mais cette maîtrise jouée via la langue et son pouvoir de découpe du réel devient un pouvoir effectif, une puissance d’impact véritable sur les choses et sur les êtres puisque grâce aux mots, à la technologie, aux échanges inter-humains de véritables actions humaines vont se produire dans un monde qui jusque là suivait son cour (cyclique) propre. 

Mais quand la mort frappe cet individu symbolique, il est difficile voire impossible de revenir de cette croyance au libre arbitre d’où tout est parti, de cette revendication à la maîtrise d’une action. Donc il FAUT bien que cette mort, puisque elle touche un Humain, et qu’un humain est un être symbolique ait une origine autre que simplement physique. Toutes ces micro-causalités qui ne font que coïncider avec la mort de cet homme ne sauraient absolument pas être reconnues comme telles et le paradoxe ici que pointe avec justesse Spinoza, c’est que l’évidence de ces coïncidences dûes simplement aux causes factuelles d’un évènement est précisément utilisée par les finalistes comme une « preuve » de la finalité supérieure de ce décès. Tout semble en effet concourir à cette mort et en un sens c’est bien le cas, mais pas du tout parce que Dieu, ou la fatalité ou le mauvais sort s‘acharne contre cet homme mais parce que c’est comme ça.

Quand une tempête se déclenche à cause de la concordance de plusieurs faits météorologiques, l’homme ne va pas nécessairement évoquer le mauvais sort, la fatalité pas même Dieu….tant que l’Homme n’est pas touché. Mais dès qu’il l’est alors forcément c’est Dieu qui l’a voulu. La dimension divine ou supérieure de la mort d’un humain ne se trouve donc pas du tout dans la réalité mais dans l’esprit de celle ou celui qui veut à toute force y lire cette finalité là et qui l’y projette sans même s’en rendre compte. Du point de vue du finalisme, Il faut donner du sens à une « violence », c’est-à-dire présupposer arbitrairement une intentionnalité à un simple enchaînement de micro-causalités qui ont abouti à la mort d’un homme. 


      

      Mais on réalise alors que la violence n’est en fait nulle part ailleurs que dans cette intentionnalité car ce qui est « violent » c’est qu’une divinité s’acharne contre un humain mais pas du tout que le vent souffle, que le bois travaille, que la pierre s’érode et que l’homme meurt (à cause de toutes ces micro actions), précisément parce qu’il est mort « comme ça » pour rien, parce que le monde est monde et que cela nous fait violence à nous. Cette absence de sens pourtant évidente nous fait violence à nous.

Nous touchons ici le fond de cette question: que le monde soit monde (et que l’homme y soit présent de plain pied, c’est-à-dire pas comme un empire comme un empire), c’est cela qui nous fait violence. Un terme ici peut être évoqué à bon escient tant son étymologie est éclairante, c’est le mot immonde qui vient du latin « immundus » constitué du préfixe négatif im et du terme mundus. L’homme est immonde parce qu’il est une créature « hors monde », hors mundus. Il nous semble anormal que le monde soit, en ce sens qu’il nous semble anormal que le monde s’effectue comme une incessante et imperceptible coïncidence de micro-causalités efficientes sans égard pour nous, et c’est pourtant bien cela qu’il est. C’est en cela que nous sommes immondes mais dans les deux sens du termes: vivant l’existence du monde comme anormale dés qu’elle suit son cours sans égards pour nous (c’est-à-dire tout le temps) , nous interprétons des faits naturels comme violents (la violence est une interprétation humaine du cours pacifique des choses) et répondons par de la violence réelle à cette violence fictive, supposée,  postulée mais fausse. 


Nous nous efforçons de réduire dés lors la nature à la fonction de ressource exploitable au profit des hommes, nous suivons le fil d’une façon d’être immonde dans un monde dont nous vivons l’existence et la temporalité cyclique comme insoutenable, inadmissible. Nous imposons à l’Aiôn la mesure linéaire et divisible de Chronos. Mais plus que tout cela encore nous créons de toute pièce la parenthèse d’une créature historique qui fait des histoires dans l’immensité d’un Cosmos au sein duquel ne se déploie que le cours tranquille des causalités et coïncidences naturelles. Il FAUT que cet homme tué par la chute de la pierre ait un destin comme Il FAUT que la créature humaine ait une histoire, c’est-à-dire qu’il fasse récit et pour ce faire qu’il lui arrive des évènements et sans jeu de mots des « tuiles », des ennuis, des aléas, des crises et des catastrophes. Il est un fond de légende qui demeure, dans tout ce qui de l’Histoire tient encore de son origine mythologique. Cela veut dire que même si l’historien est tenu de par son statut de produire un effet de réel et de vérifier le plus scientifiquement possible la véracité de ces travaux et des ses thèses, il n’en demeure pas moins lié à ce postulat de base selon lequel l’être humain est une créature dont on peut et même dont on doit raconter le développement sous toutes ses formes au gré de toutes les distinctions politiques, civilisationnelles, technologiques qu’il suit. Or, il ne s’agit là que d’un postulat dont la pertinence repose sur le hors monde humain, sur l’idée selon laquelle l’humain ne s‘insère pas dans ce champ de coalescence de toutes les micro-causalités physiques qui font que le monde est monde. Il ne peut exister d’histoire que d’un être immonde, hors monde ET violent.


              Puisque c’est donc aussi en tant qu’il est historique qu’il est immonde, qu’il décline au fil des pages de son récit historique les mésaventures de sa diachronicité, il est clair que ce lien entre la violence et l’histoire trouve son origine dans une interprétation voire dans une fausse interprétation de ce que le monde soit monde, mais en même temps, puisque les évènements provoqués par l’homme s’effectuent bien dans le monde, il faut bien qu’il recèlent en eux, une part de cette pure efficience mondaine. Autrement dit: aussi provoqués qu’ils soient par des êtres humains; ces évènements, ces crises, ces révolutions s’effectuent dans le monde, dans cette dimension naïve, innocente et pléonastique où le monde est monde. C’est exactement ce que Gilles Deleuze et Félix Guattari appellent « la part non historique de l’évènement ».

Pourquoi est-il VRAIMENT de toute urgence de comprendre ce qu’ils entendent par cette expression? Tout simplement parce que la réalisation de cette part non historique de l’évènement contient nécessairement la clé de la compréhension par l’homme de ce qui fait vraiment dans les évènements historiques qu’il provoque ou croit provoquer de telle sorte qu’en percevant ce qui de l’histoire échappe à l’histoire, il saisit également ce qui de l’immonde échappe à l’immonde (c’est l’innocence du devenir de Nietzsche):




Dans des phénomènes historiques comme la Révolution de 1789, la Commune, la Révolution de 1917, il y a toujours une part d’événement, irréductible aux déterminismes sociaux, aux séries causales. Les historiens n’aiment pas bien cet aspect : ils restaurent des causalités par-après. Mais l’événement lui-même est en décrochage ou en rupture avec les causalités : c’est une bifurcation, une déviation par rapport aux lois, un état instable qui ouvre un nouveau champ de possibles. Prigogine a parlé de ces états où, même en physique, les petites différences se propagent au lieu de s’annuler, et où des phénomènes tout à fait indépendants entrent en résonance, en conjonction. En ce sens, un événement peut être contrarié, réprimé, récupéré, trahi, il n’en comporte pas moins quelque chose d’indépassable. Ce sont les renégats qui disent : c’est dépassé. Mais l’événement lui-même a beau être ancien, il ne se laisse pas dépasser : il est ouverture de possible. Il passe à l’intérieur des individus autant que dans l’épaisseur d’une société

Et encore les phénomènes historiques que nous invoquons s’accompagnaient de déterminismes ou de causalités, même s’ils étaient d’une autre nature. Mai 68 est plutôt de l’ordre d’un événement pur, libre de toute causalité normale ou normative. Son histoire est une « succession d’instabilités et de fluctuations amplifiées ». Il y a eu beaucoup d’agitations, de gesticulations, de paroles, de bêtises, d’illusions en 68, mais ce n’est pas ce qui compte. Ce qui compte, c’est que ce fut un phénomène de voyance, comme si une société voyait tout d’un coup ce qu’elle contenait d’intolérable et voyait aussi la possibilité d’autre chose. C’est un phénomène collectif sous la forme : « Du possible, sinon j’étouffe ». Le possible ne préexiste pas, il est créé par l’événement. C’est une question de vie. L’événement crée une nouvelle existence, il produit une nouvelle subjectivité (nouveaux rapports avec le corps, le temps de la sexualité, le milieu, la culture, le travail…).

Deux régimes de fous (1984)


          
 
 Tout ce à quoi Gilles Deleuze et Félix Guattari nous invite est finalement une façon d’aborder les faits humains sous un angle pas qu’humain, voire pas humains du tout. Pour que ces évènements soient, il faut que les hommes les provoquent certes mais aussi il faut qu’existe la dimension temporelle dans laquelle ils s’inscrivent. Il faut que ça se passe « quelque part » ou plutôt dans un « quelque temps » et ce « quelque temps » ne peut pas être seulement du temps humain (Chronos) ne serait-ce que parce que la nature suit son cours en même temps sauf que ce n’est pas le même cours, ni le même temps, c’est Aiôn, un temps cosmique, imperceptible, continu, indivisible et cyclique. 

Mais qu’est-ce que ça veut dire cyclique? Cela veut dire que chaque moment de ce temps là est en même temps début et fin. Il n’y a que des débuts et des fins. Lorsque les Stoïciens nous recommandent d vivre chaque instant comme s’il était le premier et le dernier, c’est parce qu’ils savent bien qu’il y a une dimension et en fait c’est LA dimension au sein de laquelle c’est bel et bien le cas. Mais alors qu’est-ce que cela signifie? Qu’il n’y a dans ce temps là que des naissances de mondes, que chaque instant passé est celui de la nouveauté radicale et pure d’un instant.


Cette fois ci l’opposition n’est plus entre le finalisme et la causalité mais été le temps historique et le temps du monde. C’est le temps de l’histoire qui est celui de cette créature hors monde qu’est l’humain (temps qui est aussi celui de la violence) mais le temps du monde s’effectue aussi et finalement surtout dans tout ce qui s’effectue, y compris dans les évènements humains. Un historien trouve toujours a posteriori des causes historiques qui expliquent l’évènement. On peut dire par exemple que si la 2nde guerre mondiale a eu lieu, c’est notamment à cause du traité de Versailles qui finalement favorisait l’accession au pouvoir d’un chef populiste, totalitaire et nationaliste comme Hitler. C’est vrai mais ça ne se voit qu’après. Pourquoi? Parce que c’est faux, les choses auraient pu se passer différemment même avec le traité de Versailles même avec tout ce qui peut nous apparaître comme des causes de la guerre. En fait, il y a l’expression d’une autre nécessité que celle de l’enchaînement pur d’évènements historiques humains (immondes), à savoir la collusion de cette multiplicité d’héccéïtés (qui cette fois-ci ne sont plus des causalités) et sans la coïncidence desquelles rien ne peut s’effectuer. Ce n’est pas que ça tienne à rien que telle ou telle chose se passe, c’est plutôt que cela tient à une multiplicité de petits riens, et que rien jamais n’est dés lors susceptible de s’effectuer de la même façon (il ne peut pas y avoir de leçon de l’histoire). On peut toujours dire après coup que c’était prévisible, c’et faux. Bergson appelle cette impression l’illusion rétrospective du vrai. Une fois qu’un événement s’est produit, on peut toujours se dire qu’on aurait pu le prédire mais ce n’est pas exact. 




            Il n’y a pas de possible de la guerre avant qu’elle ait effectivement lieu, il y en a après. Le possible que la guerre ouvre, c’est celui qu’elle rend possible en s’effectuant. Tous les évènements sont forcément nouveaux et imprévisibles du fait même qu’ils « sont ». Ils ne sont imprévisibles qu’en étant (ce que tout le monde peut comprendre) mais ils ne sont qu’en étant imprévisibles (ce que l’on a tendance à contester après coup). C’est exactement ce que veut dire Gilles Deleuze quand il parle de « causalités par après ». 

            Nous pourrions utiliser ici l’exemple de l’évènement arrivé à Philippe Lançon et qu’il décrit dan son livre « le lambeau ». Le mitraillage de Charlie Hebdo peut sembler prévisible à cause du contexte, des caricatures de Mahomet, etc. Mais c’est faux, il aurait vraiment pu se passer quelque chose qui empêche cet évènement. Il n’est pas du tout question ici d’invoquer le hasard, mais vraiment pas. C’est juste que la logique des évènements n’est pas celle d’un raisonnement, ce n’est pas celle de l’esprit, ce n’est pas celle de 2+2=4. Tout ce qui arrive, parce que cela arrive dans la chair purement factuelle des « petits riens », des héccéïtés, est nouveau, imprédictible, et au lieu de soutenir que cette proposition est anti-scientifique (parce qu’anti-prédictible) , il faut au contraire réaliser que c’est justement la science qui le dit.

Quand nous croyons aux lois scientifiques, et nous en servons pour prédire des phénomènes qui effectivement ont lieu, le savant observe que le phénomène en question ne se passe pas exactement (avec les mêmes variables) comme le précédent et ici: de deux choses l’une, soit il soutient que ça ne fait rien, et que la loi de toute façon est juste parce que la nature obéit à des lois (et c'est la loi!), soit il réalise que la nature exprime par ces infimes variables que la loi est en train de s’user et que les occurrences des phénomènes sont en train de différer. De fait, la loi est en train de ne plus valoir. On comprend alors la puissance de l’évènement. Il n’ya pas de lois qui permettent de prédire un évènement, il y a des évènements au fil usant desquelles les lois petit à petit se délitent, se dérégularisent, se complexifient. Qu’on réfléchisse un peu et nous réaliserons que si ce n’était pas le cas, la science serait comme un livre fermé dans lequel tout du réel déjà serait dit. Si ce livre de la nature était mathématiquement écrit comme dit Galilée, nous n’aurions plus rien à mettre scientifiquement en oeuvre et en chantier.




Ce point est aussi difficile que central parce que finalement tout en découle: si nous percevons ce qui, de l’histoire des hommes telle qu’ils la vivent et décrivent par le récit historique du passé, échappe à leur compréhension humaine, rien qu’humaine, nous saisirons aussi par la même cette dimension dans laquelle la vision hors monde des hommes (c’est-à-dire leur incapacité à réaliser qu’ils vivent dans le monde, aussi différents ou particuliers qu’ils se pensent être) est invalidée, ce qui évacuerait toute possibilité de violence, d’interprétation des phénomènes naturels comme « violents ». Pour que l’homme cesse d’été immonde, il faudrait qu’il cesse de se percevoir comme « hors monde » et cela suppose qu’il réalise la « vérité », à savoir que des évènements humains, tout humains qu’ils soient, s’inscrivent dans le « devenir monde » du monde avant de s’effectuer à un niveau humain. Certes la révolution française est un bouleversement politique qui se saisit au sein d’une nation comme causé par des phénomènes économiques, idéologiques, sociologiques, etc. 

Mais ce n’est là que ce qu’une interprétation humaine peut en lire, en saisir, en comprendre. Au-delà ou plutôt en deçà de cette perspective la révolution française « a été ». Elle s’est effectuée réellement. Elle s’est incarnée dans la chair factuelle de ce qui « est » ou de ce qui fût. L’historien n’aurait pas pu travailler sur la restitution de cet évènement s’il ne s’était pas produit. Il va chercher les documents, expliquer, décrire, etc. Mais aussi loin qu’il aille, il ne rendra pas compte de la pure effectuation de la révolution. 

Mais comment définir ou, pour le moins, éclaircir un peu cette effectuation? Les actions humaines: la prise la bastille, la destitution du roi, l’organisation des assemblées et des comités, etc, tout ces actions concrètes se sont matériellement insérées à titre de données physiques dans d’autres données physiques. Qu’un fait se produise signifie cela en fait: des fluctuations dans les variables de toutes les forces naturelles qui continument produisent des chiffres, des quantas. Personne, mais vraiment personne, ne peut nier cela, et finalement ce niveau d’interprétation des faits historiques est, à tous égards, le premier, le plus effectif, le moins réfutable. 

Or il ne se situe aucunement au niveau des raisons, des causes, ni des lois. La même analyse vaut dans les sciences. Oui, je pense que le soleil va se lever demain mais en même temps, je sais que le soleil est une étoile de type naine jaune dont la durée de vie est limitée (10 milliards d’années). Le soleil consiste donc moins dans une « chose » que dans un certain type d’énergie qui se libère d’une certaine façon et pour un certain temps. Les évènements décrivent en fait tout ce qui se produit au sein de cette incroyable effectuation de variables dans la multitude des flux de forces qui composent ce moment, cet « instantané d’univers ». 


        En même temps, la fin du soleil ne marque pas la fin de l’univers mais seulement celles de notre galaxie qui n’en est qu’une parmi une infinité. C’est de l’univers dont il est ici question. Mais question pour quoi? Pour savoir où la révolution française se passe « en fait ». Il ne s’agit pas de dire que l’on est bien peu de choses dans le silence éternel des espaces infinis (Pascal), mais de comprendre que l’on ne dira rien de plus vrai sur ce qu’elle est qu’en se situant à cette échelle là qui étrangement est tout autant la plus proche et la plus lointaine, la plus proche parce que c’est la plus matérielle, la plus incontournable physiquement et la plus lointaine puisque elle suppose que l’on puisse voir un évènement de l’histoire de France du point de vue de l’univers.

Admettons tout cela, mais bon! Qu’est-ce qu’on peut dire universellement de la révolution française en terme de naine blanche, de plan galactique, de supernova? Qu’elle ne change rien à « l’ensemble », mais en même temps qu’elle s’intègre à cette totalité de petits rien qui en elle-même ne consiste qu’en cela que dans le fait de changer insensiblement, continuellement et c’est cela que l’on peut appeler le devenir monde du monde. Ce devenir là ne tend qu’à faire monde et la révolution française si peu que ce soit s’inscrit dans le mouvement global de mutation de ses variables. 

Quel sens y’aurait-il à demander en quoi consiste la finalité de l’éclatement d’une naine rouge en supernova? Aucun et c’est exactement la même chose pour la révolution française. Rien ne se produit autrement que comme ça, c’est-à-dire dans la totalité de ce mouvement de devenir monde du monde. Rien n’est plus réel, vrai que ce mouvement et dés lors, rien ne saurait être plus conforme au vrai que de situer les évènements historiques dans la perspective de ce devenir incessant. Il n’est rien que le monde puisse désirer davantage que de devenir parce qu’il est ce devenir même. Dés lors tout mouvement humain qui se saisit lui-même comme du pur, neutre et innocent devenir est plus vrai que tous ceux qui pensent obéir à une causalité particulière ou à une destination qui serait exclusivement humaine. 


            Peut-être peut-on mieux comprendre alors la difficulté du passage sur la bifurcation par rapport aux lois et de la rupture avec la causalité. Nous pourrions la rapprocher dans le domaine de la Science du passage de la physique déterministe Newtonienne à la physique aléatoire quantique. A chaque fois que l’on parle de lois naturelles, on fait comme si la nature était un bloc inerte et figé dans lequel les rapports resteraient les mêmes, mais nous savons maintenant à quel point ces rapports ne relient pas entre eux des éléments « Uns » définis par des lois immuables. Ils sont détectables au sein d’une insoupçonnable multiplicité d’interactions constantes au sein de laquelle rien n’est vraiment séparable du reste. Rien ne compte par soi seul mais en même temps, telle subtile variation ici crée là une onde de mutation aux conséquences imprévisibles et considérables à l’échelle cosmique. Cela signifie que tout micro-évènement crée un nouveau possible et que l’univers dans cette production incalculable de données est comme la chambre d’enregistrement de tous ces possibles dont il incarne la compatibilité. 

Il n’est plus dès lors de « cause » dont on puisse avec certitude dire qu’elle produira tel effet. A cette échelle, tout peut arriver parce que rien ne fait qu’arriver et nous tenons ici VRAIMENT le fin mot de toute cette affaire, c’est-à-dire que cette notion de chair évènementielle des dates historiques n’est plus du tout confuse ou abstraite et que nous comprenons pourquoi en effet elle échappe aux analyses des historiens. Nous découvrons un degré d’interprétation des faits historiques qui n’est ni celui des idéologues ou des théologiens qui veulent à tout force y voir une visée supérieure, un sens de l’histoire, ni celui des historiens qui crible les évènements de l’analyse des causes et des effets de telle ou telle date sur telle autre date. En quoi consiste-t-il? Dans la possibilité de distinguer de l’évènement son effectuation du point de vue de Chronos et celle du point de vue d’Aiôn et plus encore de faire prévaloir la seconde sur la première. En d’autres termes, il s’agit d’adopter le point de vue d’un recul d’ordre quasiment cosmique sur l’évènement à la lumière duquel il est impossible qu’il ne participe pas au devenir monde du monde. Mais ce recul correspond aussi dans les mêmes termes à une lecture au plus prés, au plus infiniment petit de tout ce qui a fait l’évènement lui-même (et cette approche nous est plus accessible). 

« Les petites différences se propagent au lieu de s’annuler »: cela signifie qu’au lieu de croire qu’il ya des lois dans l’univers au regard desquels des variations observables ne seraient que des « incidents de parcours » ou des « impondérables » qui ne revêtiraient aucun statut scientifique, elles se diffusent et se cumulent et oeuvrent déjà insensiblement en vue de générer tôt ou tard une transformation, une irréductibilité à la norme. Ce n’est pas qu’il est des choses qui échappent parfois à une lecture normative du réel, c’est plutôt qu’il n’est rien du réel qui s’effectue conformément à la norme. Le mode d’être du réel c’est l’exception pas la règle. Aucune exception ne confirme la règle, elle la déborde à tout instant et c’est pour cela que le monde « est ».

La référence à Mai 68 est à comprendre dans ce sens: rien ne le laissait prévoir, et même encore maintenant, même si on peut relever tel ou tel fait sociologique majeur qui expliquerait que Mai 68 ait éclaté, cette « révolution » est du possible à l’état pur. Aucun enchaînement de causes ne peut s’y lire comme aboutissant logiquement à lui. Ni finalité ni cause, Mai 68 se résout complètement dans la justification d’être, d’avoir été, et c’est très bien! L’adolescence d’une époque perçoit qu’on veut lui faire endosser un âge adulte dans lequel elle ne se retrouve pas, alors même qu’il est économiquement et socialement radieux (30 Glorieuses). Le niveau de vie des français n’a jamais été aussi haut et une partie de la jeunesse dit « non », comme pour désavouer le primat d’une logique exclusivement économique et individualiste.



Tout le monde essaie de situer idéologiquement Mai 68 et ainsi de le discréditer: « gauchisme », « anarchie », « désordre ». Des « jeunes » qui n’ont rien à faire d’autre descendent dans la rue et manifestent contre…on ne sait pas trop quoi, en fait. Le niveau des français est haut, il n’y a pas de crise, peu de chômage. Ils disposent par rapport aux adolescents d’aujourd’hui d’un avenir autrement radieux. C’est incompréhensible! 

Deleuze et Guattari proposent de prendre du recul par rapport à cet évènement et de réaliser ainsi que c’est justement à cause de cette absence de causalité historique, à cause de cette imprévisibilité qui a pris de court toute la classe politique, Le général de Gaulle inclus, que quelque chose de Mai 68 est un évènement  à l’état pur par qu’il révèle part non historique de l’évènement. 

  Il faut bien comprendre ici le sens du terme « immonde » tel que nous l’avons utilisé dans cette partie, notamment parce qu’en fait, il est la clé qui nous ouvre non seulement la porte de la compréhension entre violence et Histoire mais aussi celle de la solution du problème (en même temps, on réalise que ce n’est pas du tout une porte que l’humanité d’aujourd’hui semble disposé à ouvrir mais c’et une autre……histoire même si ce serait bien qu’ »on » y réfléchisse). 

L’exemple de l’homme malencontreusement tué par une pierre utilisée par Spinoza nous a mis sur la piste de l’incapacité des hommes à accepter ce complexe de micro-causalités inextricable dans lequel nous sommes de fait bel et bien pris. Ce n’est ni du hasard ni de l’intentionnalité divine ou diabolique, c’est dans cette inextricabillité de variables physiques que tout se fait, y compris la mort des hommes qui ici peuvent toujours arguer de leur supériorité, de leur conscience, de leur statut de créature symbolique restent néanmoins dans cette réalité là. 


                Aucune autorité transcendante ne veille au grain. L’idée qu’il y ait un sens supérieur qui s’exprime et qui finalement ramène dans le rang du rationnel ou du bien des évènements violents, chaotiques causés par la bêtise ou l’aveuglement des humains est intenable dés lors que l’on y voit à l’oeuvre le rôle du symbole, c’est-à-dire cette dimension créée par ce petit enfant capricieux et intelligent qui fait surgir de toutes pièces dans une réalité implacable où la mère est absente un cocon linguistique et fantasmatique dans lequel « il » (Je) décide de tout. La croyance au libre-arbitre est née « là » . Dans ce cocon, qu’un humain qui dit « je » puisse mourir parce que le vent souffle sur un toit est inacceptable, insoutenable, du moins tant que l’on n’a pas inventé, par le même procédé que celui du mimétisme symbolique de la bobine un Dieu, un « sort », un destin supérieur, une chance ou une malchance: autant de concepts qui ne reposent sur rien, ou plutôt qui sont impliqués dans le jeu de la bobine d’un enfant qui s’invente un je (dans cette perspective, Dieu c’est le super «  Je » qui fait pendant à celui que l'enfant s'est donné par le jeu).

En fait, tout ce que l’humain a conçu se retrouve dans cette dynamique  mythomaniaque de l’enfant à la bobine. Et c’est ici que l’on peut utiliser le terme  « immonde » en son sens étymologique: l’être humain est une créature « hors monde » parce que l’enfant à la bobine l’est. Il crée une « bulle de filtre » symbolique, linguistique, au sein de laquelle prend corps l’idée fictive d’une maîtrise des évènements purs du monde. 

Or cette maîtrise qui repose en dernière analyse sur le symbolisme suppose la croyance dans un sens particulier: celui d’un « vouloir dire » de la langue. Tous les faits sont donc investis d’un « vouloir dire » par le biais duquel l’être humain interprète ce qui s’effectue réellement comme voulant dire symboliquement quelque chose: la volonté de Dieu, l’accomplissement de la Raison, le mauvais oeil d’une fatalité hostile, etc. 

Il n’est pas faux d’affirmer qu’il existe une intentionnalité qui agit dans l’univers, sauf qu’elle est celle de cet univers lui-même. Pourquoi cette intentionnalité là serait-elle plus crédible, plus indiscutable que celle d’une divinité transcendante, ou d’une finalité supérieure? On serait tenté de faire remarquer que la réponse est déjà dans la question. L’intentionnalité d’un vouloir exister de « la vie » ou de l’être n’est pas sujette à caution: tout enfant qui naît, tout brin d’herbe qui pousse, tout compost qui pourrit en est la manifestation claire, aveuglante. Celle d’un Sens supérieur, d’une Raison ou d’un Dieu transcendant  induit nécessairement qu’à un moment ou à un autre, on y « croit ».

Dés lors, tout un travail de « détricotage » du faux sens en vue de parvenir au vrai s’impose à nous comme une urgence. Pourquoi? Parce que l’on réalise que rien dans ce vouloir exister (désir)  de la vie, de la nature, de l’univers n’’est « violent », en fait, pas même les éruptions volcaniques qui tuent des milliers de personnes, les tremblements de terre, ou les Tsunamis. Nous l’interprétons de cette façon précisément parce que nous sommes « hors monde ». L’esprit du mal est une interprétation humaine de la nature, des faits. L’enfant à la bobine interprète comme violente l’absence de la mère et il y répond par la violence du mot d’ordre: « Da » « Fort ».

A ce stade, la violence n’a aucun « corps », aucun lieu d’occurrence. La violence en fait n’a pas lieu d’être mais l’être humain, suite à cette fausse interprétation, va lui en faire un, est ce sera l’histoire, l’histoire d’une bobine qui part  (fort) mais avec le happy end de son retour (da), mais aussi l’Histoire tout court, la civilisation, les sociétés, bref tous les systèmes organisés linguistiquement par l’être humain pour donner prise à un univers protégé au sein duquel le traumatisme de  la violence ne cessera de s’activer comme le seul leitmotiv à même de relancer inlassablement la machine de la rationalisation, de l’efficience à rendre raison de….L’enfant humain fait histoire à partir de ce qu’il interprète comme une violence de telle sorte que la violence sera intégrée à l’humanité en tant que matrice à faire histoire. De ce que l’être humain se vive comme une créature hors monde, il s’ensuit logiquement, tragiquement et historiquement qu’il soit une créature immonde (au sens d’inhumaine et violente).

Nous sommes partis de cette hypothèse de travail selon laquelle le déni de la violence factuelle par une violence symbolique serait plus violent que la violence elle-même, mais nous réalisons maintenant que la vérité est encore bien pire puisque en fait la violence est, si l’on peut dire, « dans la tête » de la créature humaine qui parce qu’elle est « hors monde » choisit de vivre comme une violence insupportable l’existence d’un monde qui « suit son cours », c’est-à-dire sur un mode indifférent au sort de l’être humain (c’est ça l’innocence du devenir) et qui donc occulte cette indifférence par l’idéologie du sens de l’histoire. La croyance d’un sens transcendant les évènements historiques n’est finalement que la suite logique de cette interprétation de la nature, du monde, comme « violents ». Mais du coup elle « autorise » la violence réelle. Après tout la Shoah s’appuie sur le « droit » des races dites supérieures d’avoir plus de territoire que les supposées « sous-races » et de les exterminer méthodiquement. Au-delà de tout ce que l’on peut pointer ici d’infondé scientifiquement, ce qui frappe est qu’il existe toujours une idéologie justifiant et provoquant les génocides.  

De ce déni naît donc l’incapacité à voir la réalité en face, à savoir qu’il n’y a pas de violence naturelle, ni « cosmique », ni « vraie ». Il y a une non-violence fondamentale de l’aiôn, l’efficience d’une puissance pure, neutre, innocente qui est du monde de devenir monde. 


                Pour bien saisir le rapport entre l’Eternel retour et l’innocence du devenir chez Nietzsche ainsi que tout ce que nous apporte ces deux concepts dans les conclusions qu’il faut tirer ici au sujet du rapport entre la violence et l’histoire, nous devons réfléchir sur la nature de ces deux sens qui s’opposent totalement. L’être humain croit à un sens comme « vouloir dire »  (Sens de l’histoire; dieu, la raison, etc.) d’évènements qui s’inscrivent dans un « vouloir être » (le devenir monde du monde). Dans le premier cas, on fait tout son possible pour entretenir l’illusion selon laquelle tout évènement aurait une finalité cachée aux hommes, supérieure à eux et donc rationnelle en fin de compte (au bout du bout du compte). Dans le second on réalise que tout évènement s’inscrit dans une multitude de « petits riens » et que ces petits riens sont ceux là même par la coïncidence desquels chaque instant du monde accouche du prochain de celui qui vient dans la logique cyclique du devenir. Pourquoi cyclique? Parce que le monde y revient inlassablement à soi. « Le monde désire faire durer le plaisir d’être monde ». C’est cela la logique des évènements et le « miracle » ici, c’est que par évènements on entend aussi bien la révolution française que l’explosion cosmique d’une naine rouge en supernova.  Voir la part historique de tout évènement historique, c’est simplement ça: pointer dans  l’évènement  qui s’intègre à l’histoire des hommes cette part d’effectuation pure, cosmique (mais aussi constituée d’une infinité de petits riens) qui échappe à la compréhension de l’écrasante majorité des hommes.


                Si l’on prend l’exemple de Mai 68, quelque chose doit attirer notre attention mais il est clair que cela ne pourra être le cas que pour celles et ceux qui se détacheront du penchant à classifier politiquement idéologiquement « humainement » cette « révolution », quoi? C’est du pur devenir, c’’est-à-dire qu’une génération de « jeunes » revendique exclusivement le droit d’être jeune, de renouveler les cadres de pensée d’une mentalité, d’une société dans laquelle elle ne se retrouve pas, dans laquelle elle ne peut pas se retrouver en fait, tout simplement parce que ce sont de vieilles façons de penser, de vivre, d’être.  C’est comme si, au-delà des slogans, des leitmotivs politiques, le sens pur travaillant du dessous le monde par le devenir monde se manifestait enfin aux yeux de toutes et tous, c’est comme si là, à ce moment là, en France, une parcelle de vie ou d’être accédait à un degré intense et « pur » de conscience de soi. Si « sens de l’histoire » il y a, c’est justement en tant qu’il n’a rien à voir dans sa causalité avec l’histoire mais qu’en l’occurrence il s‘est bel et bien effectué aussi dans l’histoire. C’est un moment où l’éternel retour de l’aiôn affleure à la surface de chronos, un moment où l’innocence du devenir parvient miraculeusement à s’imposer dans le chaos de toutes les revendications idéologiques de seconde zone.




Conclusion

La logique des évènements, c’est de revenir à eux-mêmes parce qu’il n’ont pas d’autre sens que celui de s’inscrire dans la matérialité pure et brute d’un monde travaillé par cette seule préoccupation de se donner naissance et de faire durer le plaisir de persévérer dans son être. La violence est donc une erreur de lecture, une illusion d’optique, le présupposé d’une créature hors monde de croire dans une nature immonde à laquelle il répond par de l’immonde historique. La « solution » n’est certainement pas de revenir de cette mimétique symbolique qui d’ailleurs ne recèle pas que de la violence et de l’immonde mais avant tout chose de se rendre sensible à l’innocence du devenir, à ce fond de pacifisme indéracinable et finalement premier qui oeuvre en toute effectuation, quel que soit son niveau, son amplitude, sa puissance d’impact. Puisque l’homme ne vit la réalité qu’en y décelant la violence dont il ne s’aperçoit pas qu’elle est toute entière incluse dans sa façon « hors monde » d’être au monde, la solution du problème consiste fondamentalement à réaliser qu’il EST le problème, ce qui induit finalement qu’il réalise d’abord le Da sein, puisque c’est bien e cela dont il est question. 

En effet, si l’homme est la seule créature hors monde, c’est justement parce qu’il ne   le  vit pas comme un milieu, contrairement aux animaux. Le travail alloué à l’homme est donc en effet difficile notamment parce qu’il n’est pas question de revenir de cette spécificité. C’est un fait acquis que l’homme n’a pas de sillon génétique à creuser, de toile à faire comme l’araignée ou de cellule comme l’abeille. Tout ce que l’homme a c’est la conscience qu’il n’a rien et l’angoisse inhérente à la réalisation de ce vide. Mais en même temps, tout est là: il est la manifestation consciente, impliquée de l’innocence du devenir. Il est cette attention affûtée à la nature inexorable de ce devenir monde du monde, celle-là même qui va trouver son bonheur dans la joie de faire durer le plaisir d’être. C’est bien là le fond des dernières lignes du livre d’Albert camus le mythe de Sisyphe:

« Toute la joie silencieuse de Sisyphe est là. Son destin lui appartient. Son rocher est sa chose. De même, l'homme absurde, quand il contemple son tourment, fait taire toutes les idoles. Dans l'univers soudain rendu à son silence, les mille petites voix émerveillées de la terre s'élèvent. Appels inconscients et secrets, invitations de tous les visages, ils sont l'envers nécessaire et le prix de la victoire. Il n'y a pas de soleil sans ombre, et il faut connaître la nuit. L'homme absurde dit oui et son effort n'aura plus de cesse. »


Bien sûr il est possible de discuter de la pertinence de l’expression: « homme absurde » puisque en fait il serait tout aussi juste d’évoquer l’homme « sensé », celui qui est revenu de toutes les illusions du faux sens de l’histoire, de toutes les idéologies s’épuisant à donner un sens transcendant à des évènements immondes. Nous connaissons l’expression « abonder dans le sens de… » désignant l’accord mais aussi l’implication dans le sens d’une parole que l’on comprend, que l’on accepte, à laquelle on adhère entièrement. Il n’y a pas plus dans les cieux d’esprit bienveillant que de Dieu vengeur, il n’y a pas de « cieux ». On peut faire l’économie de cette très coûteuse hypothèse. Dés lors, tout nous apparaît tel qu’il est: la vie se désire elle-même, la nature est en elle-même animée du désir de se faire « accoucher » d’elle-même et cet auto-engendrement s’actualise partout et dans tous les moments. Le humains aveugles à la dynamique de cette fécondité cyclique ne la conçoive qu’en tant qu’elle leur fait injure « personnellement », et ils la prennent en mauvaise part. De cette injure mal comprise, mal entendue naît la violence de l’histoire, mais de cela aussi la nature n’en a que faire, de telle sorte que rien, pas plus dans le cosmos que dans les évènements dits humains, ne s’écarte du tracé sans avenir d’un devenir persistant, entêtant, continu. Il n’est pas dit que l’Humain  reste toujours aveugle à cette évidence, même si de fait, rien du comportement historique de l’homme ne semble de nature à nous rendre optimistes à cet égard, mais nous n’avons pas à faire preuve d’optimisme ou de pessimisme, juste à tenir cette ligne qui, en tant que Da Sein nous définit spécifiquement, abonder consciemment dans le sens sans finalité, ni but ni avenir, de tous ces univers gagnés par la joie pure de faire durer le plaisir d’être. 




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