mardi 23 mars 2021

Terminales 1 et 3: Cours en distanciel du 24/03/2021 - Préparation du bac blanc de Philosophie


Toujours dans le cadre de la préparation à l’épreuve du bac blanc de Philosophie qui aura lieu lundi prochain (29/03), je vous propose (pour la Terminale 1 l’heure d’EMC est exceptionnellement remplacée par une heure de Philosophie afin de disposer d’une séance plus longue) de poursuivre les exercices à partir des trois sujets abordés lundi dernier. Les conditions de notation sont identiques: le travail est facultatif et il convient de me l’envoyer aujourd’hui ou demain dernier délai. Ne consacrez pas plus de 2h pour le réaliser. Ce sera noté Coefficient 1. De plus, il va de soi que vous pouvez l’envoyer en m’indiquant que vous ne souhaitez pas que le travail envoyé soit noté. Vous pouvez également, une fois la note reçue, m’indiquer par retour de mail que vous préférez que la note ne compte pas dans votre moyenne du 3e trimestre. L’essentiel est que vous mobilisiez vos connaissances et votre acquisition des méthodes sur des exercices précis. C’est la meilleure façon de préparer l’épreuve de lundi.


Les sujets proposés sont les suivants:

Sujet 1:

Puis-je dire de mon existence qu’elle ne m’engage à rien?

Sujet 2:

Peut-on se « payer de mots »?

Sujet 3:

Expliquez le texte suivant:

"Il est dans la nature même des régimes totalitaires de revendiquer un pouvoir sans bornes. Un tel pouvoir ne peut être assuré que si tous les hommes littéralement, sans exception aucune, sont dominés de façon sûre dans tous les aspects de leur vie. [...] Toute neutralité, toute amitié même, dès lors qu'elle est spontanément offerte, est, du point de vue de la domination totalitaire, aussi dangereuse que l'hostilité déclarée : car la spontanéité en tant que telle, avec son caractère imprévisible, est le plus grand de tous les obstacles à l'exercice d'une domination totale sur l'homme. […]
    Ce qui rend si ridicules et si dangereuses toute conviction et toute opinion dans la situation totalitaire, c'est que les régimes totalitaires tirent leur plus grande fierté du fait qu'ils n'en ont pas besoin, non plus que d'aucune forme de soutien humain. Les hommes, dans la mesure où ils sont plus que la réaction animale et que l'accomplissement de fonctions, sont entièrement superflus pour les régimes totalitaires. Le totalitarisme ne tend pas vers un règne despotique sur les hommes, mais vers un système dans lequel les hommes sont de trop. Le pouvoir total ne peut être achevé et préservé que dans un monde de réflexes conditionnés de marionnettes ne présentant pas le moindre soupçon de spontanéité. Justement parce qu'il possède en lui tant de ressources, l'homme ne peut être pleinement dominé qu'à condition de devenir un spécimen de l’espèce animale homme."

 
                                                    Hannah Arendt, Les origines du totalitarisme, 1951,

La connaissance de la doctrine de l'auteur n'est pas requise. Il faut et il suffit que l'explication rende compte, par la compréhension précise du texte, du problème dont il est question."

   



1) Choisissez l’un de ces sujets et rédigez une introduction.

2)   Je vous propose un texte utilisable dans le traitement de votre sujet. Ce texte développe une argumentation en faveur de la réponse positive ou négative de la question du sujet. Pour le sujet 3, il s’inscrit parfaitement dans le cadre fixé par le texte de Hannah Arendt. Quelle utilisation feriez vous de ce texte dans votre dissertation? L'exercice est le suivant: en fonction du sujet que vous avez choisi, rédigez intégralement un paragraphe dans lequel vous vous appuyez sur cette référence (texte de Sartre pour le sujet 1, ou de John Austin pour le sujet 2, ou de Stanley Milgram pour le 3) pour traiter le sujet (1 ou 2) ou le texte de Hannah Arendt (sujet 3).

Pour le sujet 1:

"Dostoïevski avait écrit : "Si Dieu n'existait pas, tout serait permis." C'est là le point de départ de l'existentialisme. En effet, tout est permis si Dieu n'existe pas, et par conséquent l'homme est délaissé, parce qu'il ne trouve ni en lui, ni hors de lui une possibilité de s'accrocher. Il ne trouve d'abord pas d'excuses. Si, en effet, l'existence précède l'essence, on ne pourra jamais expliquer par référence à une nature humaine donnée et figée ; autrement dit, pas de déterminisme, l'homme est libre, l'homme est liberté. Si, d'autre part, Dieu n'existe pas, nous ne trouvons pas en face de nous des valeurs ou des ordres qui légitimeront notre conduite. Ainsi, nous n'avons ni dernière nous, ni devant nous, dans le domaine numineux des valeurs, des justifications ou des excuses. Nous sommes seuls, sans excuses. C'est ce que j'exprimerai en disant que l'homme est condamné à être libre. Condamné, parce qu'il ne s'est pas créé lui-même, et par ailleurs cependant libre, parce qu'une fois jeté dans le monde, il est responsable de tout ce qu'il fait".
            Sartre, L'existentialisme est un humanisme, 1946, Folio essais, p. 39-40


Pour le sujet 2:

             

"Nous devions, souvenez-vous, considérer quelques cas (et seulement quelques-uns, Dieu merci !) où dire une chose, c'est la faire, et noter quel sens cela pourrait avoir. Ou encore, des cas où par le fait de dire, ou en disant quelque chose, nous faisons quelque chose. Ce thème appartient, parmi beaucoup d'autres, au récent mouvement de remise en question d'une présupposition très ancienne: dire quelque chose, c'est toujours et tout simplement affirmer quelque chose. Présupposition sans nul doute inconsciente, sans nul doute erronée, mais à ce qu'il semble, tout à fait naturelle en philosophie (…)
    J'ai commencé par attirer votre attention, au moyen d'exemples, sur quelques énonciations bien simples, de l'espèce connue sous le nom de performatoires ou performatifs. Ces énonciations ont l'air, à première vue, d' « affirmations » – ou du moins en portent-elles le maquillage grammatical. On remarque toutefois, lorsqu'on les examine de plus près, qu'elles ne sont manifestement pas des énonciations susceptibles d'être « vraies » ou « fausses ». Être « vraie » ou « fausse », c'est pourtant bien la caractéristique traditionnelle d'une affirmation. L'un de nos exemples était, on s'en souvient, l'énonciation « Oui [je prends cette femme comme légitime épouse] », telle qu'elle est formulée au cours d'une cérémonie de mariage. Ici nous dirions qu'en prononçant ces paroles, nous faisons une chose (nous nous marions), plutôt que nous ne rendons compte d'une chose (que nous nous marions). Et l'acte de ce se marier, comme celui de parier, par exemple, serait décrit mieux (sinon encore avec précision) comme l'acte de prononcer certains mots, plutôt que comme l'exécution d'une action différente, intérieure et spirituelle, dont les mots en question ne seraient que le signe extérieur et audible. Il est peut-être difficile de prouver qu'il en est ainsi ; mais c'est – je voudrais l'affirmer – un fait. »

                                                             J. L. Austin, Quand dire c'est faire, 1962.


Pour le sujet 3: 

        "Cela peut illustrer une situation dangereuse qui caractérise toute société complexe : sur le plan psychologique, il est facile de nier sa responsabilité quand on est un simple maillon intermédiaire dans la chaîne des exécutants d’un processus de destruction et que l’acte final est suffisamment éloigné pour pouvoir être ignoré. Eichmann lui-même était écœuré quand il lui arrivait de faire la tournée des camps de concentration, mais pour participer à un massacre, il n’avait qu’à s’asseoir derrière son bureau et à manipuler quelques papiers. Au même instant, le chef de camp qui lâchait effectivement les boîtes de Zyklon B dans les chambres à gaz était également en mesure de justifier sa propre conduite en invoquant l’obéissance aux ordres de ses supérieurs. Il y a ainsi fragmentation de l’acte humain total ; celui à qui revient la décision initiale n’est jamais confronté avec ses conséquences. Le véritable responsable s’est volatilisé. C’est peut-être le trait commun le plus caractéristique de l’organisation sociale du mal dans notre monde moderne.
          Le problème de l’obéissance n’est donc pas entièrement psychologique. La forme et le profil de la société ainsi que son stade de développement sont des facteurs dont il convient de tenir compte. Il se peut qu’à une époque, l’individu ait été capable d’assumer la pleine responsabilité d’une situation parce qu’il y participait totalement en tant qu’être humain. Mais dès lors qu’est apparue la division du travail, les choses ont changé. Au-delà d’un certain point, l’émiettement de la société en individus exécutant des tâches limitées et très spécialisées supprime la qualité humaine du travail et de la vie."

        Stanley Milgram, Soumission à l'autorité. Un point de vue expérimental, 1974



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