lundi 18 janvier 2021

CSD Terminale 1 - Cours du 18/01/2021

   


2) Perceptions de mondes et structures de langues
        a) Système et différences

            Nous pourrions réfléchir à ces deux citations distinctes dans le temps comme par leur sens, par l’intentionnalité qui les parcourt à deux époques différentes par le premier linguisticien  (« dans la langue, il n’y a que des différences ») et par un philosophe structuraliste français (Roland Barthes: « La langue est fasciste »).
            Lorsque Ferdinand de Saussure dit: « dans la langue il n’y a que des différences », il pointe le fait que toute langue est structurée par un principe qui est celui du caractère arbitraire de la correspondance entre le signifiant et le signifié: le mot cheval en français n’a aucun rapport avec l’animal à quatre pattes réel, physique, fait de chair et d’os dont je peux flatter l’encolure dans la réalité. Mais alors pourquoi est-ce que je me représente l’image d’un cheval quand j’entends le signifiant /Che/val/ ? On ne peut répondre que par trois points:

    - Déjà, c’est bien le sens de la phrase tout signe linguistique est psychique: le signifié est une idée, un concept, une catégorie. Cheval est le signifiant « mental » du signifié /Che/Val/ en tant qu’idée pas en tant que réalité parce que si c’était le cas il ne pourrait désigner que ce cheval ci celui dont je flatte l’encolure ici et maintenant et tel autre cheval ne pourrait pas être désigné par ce terme. Ce serait un e langue de noms propres, autant dire que ce ne serait pas une langue (imaginez qu’il nous faille désigner chaque être chaque parcelle de l’espace et du temps par un terme: ce serait sûrement une perception pure, brute, mais chaotique et confuse: nous ne pourrions rien « ranger », classifier ». Nous ne pourrions rien dire de rien, juste le vivre dans un silence de mots et de sens total)
    - Deuxièmement, cela signifie que quand je vois un cheval et que ce terme me vient pour qualifier cet animal dont je flatte ici et maintenant l’encolure, cette correspondance entre mon expérience vécue, sensible et ce terme s’effectue finalement ailleurs que dans cette réalité même, ailleurs que dans la sensation tactile de sa crinière perçue ici et maintenant. Elle s’effectue à partir de ce fond structural de ma langue maternelle au sein duquel ces deux syllabes vont se détacher de tous les autres morphèmes que je possède dans mon bagage linguistique pour s’accorder avec ce flux de sensation là. Les sensations perçues « m’inspirent » « ça »: /Che/val/   mais pourquoi pas /che/nal/ ou /che/veu/ ? Parce  que le sens du morphème cheval vient précisément de ceci qu’il est composé de phonèmes distincts (et une seule petite distinction suffit) de ceux qui constituent le morphème « /che/nal/ ». Cela veut dire que la correspondance entre les sensations physiques que j’éprouve de la présence de ce cheval ici maintenant et le terme que j’applique à ces sensations en disant: « je caresse l’encolure d’un cheval » m’est finalement moins « inspiré » par la réalité physique que je vis que par les distinctions linguistiques qui s’opèrent continuellement au sein du système unifiant tous les signifiants les uns aux autres, c’est-à-dire de ma langue maternelle. Caresser un cheval, c’est un fait linguistique AVANT d’être un fait physique, ne serait-ce que parce que je n’aurais pas approché ma main de son encolure de cheval si je ne l’avais pas linguistiquement identifié comme cheval et distingué ainsi d’autres éléments présents dans ce moment constituant une sorte de fond d’écran perceptif duquel le cheval se détache comme animal dont je flatte l’encolure.
 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire