dimanche 8 novembre 2020

Ecriture libre - "Mes mémoires poussières: la conscience des damnés" de Paul Cohendet ( Partie 1: Nous)

                                                           Partie 1: Nous           


 Ce matin, comme tous les autres matins, dans notre chambre qui pue la fumée, Nous Gary se levons et clignons les yeux plusieurs fois avant de voir clair. La chambre, comme d’habitude, est sale, crasseuse, le bazar sans nom. De plus, des insupportables odeurs de fumée flottent dans la chambre, et ce n’est pas la minuscule fenêtre qui pourrait y changer quelque chose. Depuis plusieurs mois, Nous Gary demande à changer de chambre, pour fuir cette asphyxiante fumée et cette minuscule fenêtre, à ses yeux. En réalité, la fenêtre est de taille moyenne, des cinquantaines de centimètres de côtés, mais Nous Gary avons des notions spéciales des tailles. Pour Nous Gary, tout est trop petit. Mais ne parlons plus de cela. Comme chaque matin, Nous Gary se levons en hâte de notre lit pour aller ouvrir la fenêtre et voir, regarder au dehors, pour voir les autres Nous. Nous Gary tirons la chaise, la plaçons devant la fenêtre et s’y asseyons, et commençons à voir au dehors :   « Comme chaque matin, le premier à passer devant la maison est Nous Daniel, notre voisin. Nous Daniel sommes connus de nous depuis très longtemps. Nous Daniel sommes grand, pâle, avons des cheveux de jais, des corps fins et musclés, des beaux yeux bleus et des grands pieds. Aujourd’hui, Nous Daniel portons des belles chaussures noires cirées, des pantalons jaunes fraîchement repassés, des belles chemises noires ainsi que des beaux nœuds papillons jaunes. Nous Daniel portons des petites mallettes noires dans la main droite. Nous Daniel sommes célibataire et travaillons à la Banque B. Nous Daniel tournons au coin de la rue et Nous Gary perdons Nous Daniel de vue.  Nous Gary nous arrêtons un moment de parler et de contempler (Nous Gary contemplons en parlant, par les paroles), le temps de reprendre nos esprits. Et Nous Gary y replongeons.                                                 

            « Il y a également Nous Jacques, qui allons travailler tôt. Nous Jacques sommes de taille moyenne. Nous Jacques avons de la barbe, des lunettes, et Nous Jacques sommes notre autre voisin. Nous Jacques n’aimons pas beaucoup Nous Daniel. Nous Jacques avons des cheveux blancs et des yeux clairs. Nous Jacques portons aujourd’hui des beaux kilts verts et rouges, des mocassins marron, et des amples chemises blanches. Nous Jacques portons également des sacs sur notre dos.  Nous Jacques sommes professeur enseignant d’histoire philosophique et de liberté, Nous Jacques sommes connu des polices et Nous Jacques sommes qualifié de révolutionnaire et d’hérétique, mais Nous Jacques sommes malgré cela toujours vivant. Au vu de notre tête à Nous Jacques, Nous Jacques avons préparé des contrôles pour aujourd’hui.                                                  


            En face de chez nous habitons Nous Severus, professeur des chimies, des chimistes et spécialiste dans les arts des dissimulations. Nous Severus sommes assez grand, avons des cheveux longs noirs des habits toujours noirs comme les mallettes, noires, et Nous Severus avons le visage toujours profondément triste. Nous Severus avons aimé des personnes que Nous vilaines personnes ont odieusement assassinés. Nous Severus sommes collègues avec Nous Jacques et Nous Severus apprécions Nous Jacques. Nous Severus connaissons Nous Jacques depuis notre jeune enfance et Nous Severus sommes amis avec Nous Jacques.          

            Enfin, il y a Nous Michel, notre plus vieil homme du quartier B. Nous Michel sommes petit, Nous Michel faisons seulement cent cinquante centimètres de hauteur. Nous Michel avons des cannes de bois sculptés aux pommeaux argentés. Nous Michel avons comme à nos habitudes des belles chaussures cirées noires, des pantalons noirs fraîchement repassés, des chemises blanches immaculées, des vestes noires même pas froissées, et des cravates bleu profond. Nous Michel avons des petits pieds mais des grandes mains calleuses. Nous Michel avons des grandes oreilles, les nez grands, des yeux petits, et des visages fatigués par les temps et les usures des temps.

            Nous Gary nous arrêtons alors de contempler, de parler, de penser. On entend des bruits derrière la porte de la chambre et on frappe à la porte. Nous Gary nous retournons. La porte s’ouvre, ce sont Nous Maggie, notre mère, qui dit à Nous Gary : « Notre fils Nous Gary, venons manger. Les petits déjeuners sont prêts». Et Nous Gary disons : « Nous arrivons ». Nous Gary sortons de la chambre, tournons à droite, descendons des escaliers et arrivons dans la cuisine. Nous Gary sommes le dernier levé. Nous avons déjà dans la cuisine Nous Maggie, notre mère ; Nous Alan et Nous Robin, nos frères ; Nous Joie et Nous Dolor, nos sœurs ; ainsi que Nous Crux, notre père. Nous famille sommes les Nous Dyeux. Ce matin, comme tous les autres matins, c’est Nous Maggie qui avons préparé les petits déjeuners. Ce matin, comme tous les autres matins, Nous Alan et Nous Robin avons fait des musculations ; Nous Crux avons regardé les informations sur les télévisions ; Nous Dolor avons reçu des nouveaux refus en rapport avec nos demandes de couples, et Nous Joie devons avoir comme d’habitude passer les nuits avec Nous Jack, notre amant. Nous Maggie avons 45 ans, Nous Maggie sommes de famille très riche et très puissante. Nous Maggie mesurons cent soixante centimètres de hauteur. Nous Maggie avons des cheveux courts grisonnants, des nez fins, des petits yeux, des petites oreilles, des petites bouches, des petits pieds et des petites mains. Nous Maggie portons aujourd’hui des amples robes vertes. Nous Crux avons 68 ans. Nous Crux avons repéré Nous Maggie lorsque Nous Maggie étions au collège. Nous Crux mesurons cent quatre-vingt-dix centimètres de hauteur. Nous Crux avons des longs cheveux bruns, des petits nez, des petites oreilles, des grandes bouches, des grands yeux, des grands pieds et des grandes mains. Nous Crux portons aujourd’hui des complets noirs. Nous Alan avons 17 ans et mesurons cent soixante-quinze centimètres. Nous Alan avons les mêmes caractéristiques physionomiques que Nous Crux, hormis la taille. Nous Alan portons aujourd’hui des tee-shirts rouges avec les mots « FUCK MY DAD » dessus avec des shorts jaunes.                 

              Nous Robin avons 18 ans, mesurons cent quatre-vingt-dix centimètres et sommes la copie conforme de notre père Nous Crux. Nous Robin portons aujourd’hui des marcels et des joggings.                   

            Nous Dolor avons 22 ans, mesurons cent trente centimètres et hormis la hauteur sommes la copie conforme de Nous Maggie notre mère. Nous Dolor portons aujourd’hui des simples pantalons gris et des simples chemisiers blancs.                                              


             Nous Joie sommes la plus belle des frères et sœurs. Nous Gary arrivons juste après en matière des beautés. Nous Joie mesurons cent soixante-quatre centimètres et demi, avons 25 ans, avons des cheveux bruns qui nous arrivent à peine au-dessous du niveau des épaules, des yeux beaux, marron de surcroît, des belles oreilles, des beaux nez et des belles bouches. Nous Joie sommes très complice avec Nous Gary car Nous Joie et Nous Gary sommes des faux jumeaux. Nous Joie portons aujourd’hui des jupes mi longues qui nous arrivent au niveau des genoux, ainsi que des hauts avec les cols en forme de V. Nous Gary avons 25 ans. Nous Gary faisons cent quatre-vingt-sept centimètres de hauteur. Nous Gary avons des cheveux noirs avec des belles boucles, des visages fins, des yeux noirs, des nez fins, des grandes oreilles et des grandes bouches. Nous Gary avons également des très grandes mains et des très grands pieds. Nous Gary sommes faux jumeaux avec Nous Joie. Aujourd’hui, Nous Gary portons des pantalons bleu et des tee-shirts blancs.                
             

Alors que Nous Gary entrons, des discussions commencent :

- Avons Nous Tous vu ce qu’il se passe en ces moments aux abords de La Ville ? » demandons Nous Maggie.
- Encore des problèmes avec les portes, répondit Nous Crux, des mauvaises tentent de sortir ou d’entrer dans La Ville. Pourtant, Tout les Nous, et Nous Tous ici présents, savons parfaitement que nous ne pouvons ni entrer ni sortir de La Ville, car Nous le savons Tous, il n’y a rien au dehors de La Ville. La Ville c’est le monde entier. Il n’y a rien d’autre.
- Alors d’où viennent ceux qui tentent de pénétrer dans La Ville ? demandons Nous Gary.
- Personne ne savons d’où les autres venons. Nous Tous savons seulement qu’ils veulent rentrer.
            
Et les discussions se clôturèrent de ces façons. Nous Gary nous rendons compte que nous n’avons pas expliqué ce que sont La Ville. Dans La Ville, Nous pouvons Tous vivre comme nous voulons, mais en restant dans La Ville. Nous pouvons Nous y balader, Nous pouvons y vivre, mais Nous ne pouvons pas en sortir, ni y rentrer après être sorti si toutefois nous y arrivons. Dans La Ville, il n’y a que du collectif, qui est Nous, il n’y a pas, Nous allons dire des mots interdits, il n’y a pas d’unité dans La Ville. Pourtant, à en croire notre père, Nous sommes Tous Un, dans La Ville. Mais il nous faut dire que Nous sommes Nous, c’est tout. Après les petits déjeuners, Nous Maggie et Nous Crux allons aux travails, Nous Alan et Nous Robin allons aux écoles, Nous Dolor allons aller essayer de faire des rencontres dans des cafés, Nous Joie allons rester travailler dans la maison, Nous Joie sommes en télétravail. Nous Gary n’avons pas de travail. Nous Gary sommes également célibataire, et Nous Gary n’avons jamais été « en couple », car Nous Gary trouvons tout ces jeux des apparences puérils, mais Nous Gary, mais Nous Gary aimons nous autre Nous secrètement. Nous Tous famille seront tous rentrés avant les 21 heures du soir, car il y a des couvre-feux dans La Ville, des 21 heures du soir aux 6 heures du matin.                                                   

                C’est tous les jours les mêmes choses, les mêmes routines, les mêmes ennuis, les mêmes discussions, les mêmes rencontres, les mêmes apparences, les mêmes images, les mêmes informations, c’est tous les jours les mêmes vies......

(La suite bientôt)

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